Novembre 2005


 


Sans se prononcer sur le fond la Cour de cassation rejette pour des raisons de forme le pourvoi contre le non lieu de Dunkerque

Le 15 novembre, la Chambre criminelle de la Cour de cassation rejette le pourvoi formé par quatre victimes et familles de victimes de Dunkerque, soutenues par l'Ardeva Nord-Pas-de-Calais et l'Andeva, contre une décision de non lieu.

La Cour de Cassation a pris une décision de pure forme, estimant que le pourvoi était irrecevable en vertu de l'article 575 du Code de Procédure pénale. Ce texte dispose, en effet, que seul le parquet est compétent pour former un pourvoi en cassation, les parties civiles ne pouvant le faire que dans des cas très exceptionnels.

Dans un communiqué de presse l'Andeva et l'Ardeva Dunkerque soulignent que "cette décision a été douloureusement ressentie par les veuves de Dunkerque qui étaient venues spécialement en car écouter le délibéré. Depuis plus d'un an, elles défilent un mercredi toutes les trois semaines devant le palais de justice de la capitale des Flandres pour protester contre la décision de non lieu. Désormais, c'est le sentiment de colère qui prévaut pour toutes les victimes de l'amiante en France et leurs associations."

Pour l'Ardeva, et pour l'Andeva, cet arrêt de la Cour de Cassation "ne fait que confirmer l'inertie du parquet et de la Chancellerie qu'elles ne cessent de dénoncer depuis plusieurs années. Il est en effet totalement inadmissible que dans la plus importante affaire de santé publique, qui entraîne la mort de 3000 personnes chaque année, le parquet ne soit pas à l'origine des poursuites pénales. Cet état de fait traduit le manque de volonté politique de la Chancellerie de déboucher sur un procès pénal de l'amiante en France".

Inertie d'autant plus inacceptable "au lendemain de la publication du rapport de la mission d'information du Sénat qui a pointé les graves responsabilités des industriels et des pouvoirs publics"...

Après cette décision, les victimes et leurs associations ont "exigé que le Garde des Sceaux les reçoivent dans les plus brefs délais", estimant que "le ministre de la Justice leur doit des comptes"

Le communiqué conclut : "Nous attendons que des moyens significatifs soient affectés au pôle judiciaire de santé publique chargé aujourd'hui de l'instruction des affaires amiante, et que le parquet participe activement, avec ses moyens judiciaires, à la conduite d'une instruction de qualité, plutôt que de rester passif comme il l'a fait jusqu'à présent".

Chantiers de désamiantage : les règles de sécurité ne sont pas respectées

Le 16 novembre, Gérard LARCHER présente le bilan de la campagne de contrôle des chantiers de désamiantage conduite en juin et juillet 2005 par l'inspection du travail, avec la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) et l'Institut national de recherche et de sécurité (INRS).

784 chantiers ont été visités (10 fois plus qu'en 2004). De "nombreuses irrégularités" ont été constatées "tant sur les mesures de protection des salariés que sur les dispositions de nature à limiter les risques de propagation de l'amiante". Elles ont donné lieu à des sanctions pénales et administratives : 84 arrêts de chantiers, 6 injonctions avant pénalités financières, 41 procès-verbaux et 390 courriers d'observations.

Après avoir constaté que 67% des chantiers ne respectaient pas entièrement la réglementation, le ministre a indiqué qu'il restait «  plus que jamais déterminé à faire respecter la réglementation sur les chantiers de désamiantage  » et que cette détermination se traduirait aussi par «  le renforcement de la réglementation  ».

Dans un communiqué de presse le Comité anti-amiante de Jussieu et l'Andeva posent la question : "Combien de temps encore va-t-on supporter que la réglementation censée protéger la santé et la sécurité des salariés ne soit pas appliquée ?"

Ils espèrent que les déclarations du ministre sur sa détermination à faire respecter la règlementation "se traduiront dans les actes" mais rappellent qu'une "une première campagne de contrôles menée en 2004 "avait conduit au même constat". Le bilan est clair : "entre 2004 et 2005, aucune amélioration significative de la situation n'a été enregistrée" :

Il s'agit là "d'infractions majeures à la réglementation" dont les conquéences sont graves pour la santé ! "Quand on n'abaisse pas suffisamment l'empoussièrement en zone et qu'on n'utilise pas les protections respiratoires adéquates, cela signifie concrètement que les ouvriers concernés peuvent inhaler des quantités d'amiante considérables. Cette situation est inadmissible et il est incompréhensible qu'il n'y soit pas mis fin immédiatement".

"On ne peut pas faire deux ans de suite le même constat accablant quand on a les moyens de résoudre les problèmes (...). "Les entreprises effectuant le retrait de l'amiante sont des entreprises répertoriées disposant d'une qualification spécifique. Ces entreprises sont peu nombreuses, une centaine environ. Il n'y a donc aucune difficulté à les contrôler"

"Tant qu'un contrôle spécifique et systématique ne sera pas mis en place par l'Etat, la réglementation ne sera pas appliquée car nous sommes dans un domaine où la sécurité a un coût. Pour remporter un marché, les entreprises sont amenées à casser les prix et donc à abaisser le niveau de sécurité du chantier. Sans contrôle, ce sont nécessairement celles qui ne respectent pas la sécurité qui emportent les marchés. "

L'ANDEVA et Comité Anti-Amiante Jussieu demandent au ministre de les recevoir rapidement : "on ne peut accepter plus longtemps les contaminations à l'amiante aujourd'hui qui donneront les cancers de demain".