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JEAN-CLAUDE ZERBIB
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DCEA/SAC/UGSP/97-762 JCZ/dl Décembre 1997
I - L’AMIANTE ET SES USAGES INDUSTRIELS L’amiante est un matériau naturel qui englobe plusieurs variétés de fibres minérales, dont les propriétés mécaniques, physiques et chimiques, ont conduit, dès la fin du siècle dernier, à de nombreux usages dans l’industrie et le bâtiment notamment. L’industrie de l’amiante remonte à 1880 environ, date des premières exploitations de grands gisements canadiens et russes. L’essor sera donné par les industries textiles françaises et anglaises qui produisent des tissus incombustibles. La nature fibreuse de l’amiante et sa résistance à la chaleur et à la traction, se prêtent à la réalisation de fils, tresses, cordons et textiles isolants. Mélangées à une résine synthétique, les fibres permettent la fabrication de garnitures de freins ; incorporées à du papier, du carton ou du caoutchouc, elles constituent des filtres pour piéger des aérosols, des plaques d’isolation ou des joints d’étanchéité résistant à la chaleur. L’usage le plus important a consisté en la réalisation de plaques et canalisations en fibrociment (95% de l’amiante mise en oeuvre en France) et de dalles plastiques pour les revêtements de sol. La fibre d’amiante confère en effet au ciment une résistance et une souplesse qui permettent la réalisation de plaques (ondulées ou non) et de conduits d’épaisseurs relativement faibles. Mélangées à un liant projeté sous pression les fibres d’amiante ont aussi été utilisées dans le bâtiment pour réaliser différents calorifugeages ou "flocages" en revêtement de diverses surfaces (structures métalliques porteuses, murs, plafonds). L’industrie de l’amiante a entraîné une exposition, par inhalation, des salariés qui assuraient l’exploitation des gisements, la préparation des matières de base, la manipulation et l’installation des différents produits industrialisés. La large utilisation de l’amiante dans le bâtiment a eu pour effet, en plus de l’exposition directe des ouvriers lors des chantiers, de provoquer une exposition indirecte d’autres salariés et de personnes du public. Le procédé de flocage a été interdit en France en juin 1977. Le tableau 1 et la figure 1 donnent l’évolution des importations françaises. De 1945 à 1974, la consommation d’amiante n’a pratiquement pas cessé de croître, en passant d’environ 10 000 à près de 180 000 tonnes par an, avant de décroître pour atteindre environ 35 000 tonnes en 1992-1994. Il ne semble pas que l’interdiction du flocage des locaux, intervenue en 1977/78, ait joué un rôle important dans la réduction progressive du tonnage d’amiante importé. tableau I : Evolution du tonnage d’amiante importé en France année 1945 1946 1947 1948 1949 1950 1951 1952 tonnage 9 782 37 318 21 032 20 698 25 323 33 557 40 453 56 033 année 1953 1954 1955 1956 1957 1958 1959 1960 tonnage 32 857 38 354 51 360 56 135 67 564 67 431 61 551 87 247 année 1961 1962 1963 1964 1965 1966 1967 1968 tonnage 98 229 97 420 74 530 109 541 106 666 124 436 126 743 128 608 année 1969 1970 1971 1972 1973 1974 1975 1976 tonnage 135 137 151 848 128 980 148 298 158 549 177 707 138 637 143 625 année 1977 1978 1979 1980 1981 1982 1983 1984 tonnage 114 790 110 612 126 476 127 123 102 318 83 639 76 265 70 170 année 1985 1986 1987 1988 1989 1990 1991 1992 tonnage 63 873 65 067 70 206 76 365 66 556 61 500 67 373 35 866 année 1993 1994 tonnage 34 600 34 868 Sources :Données regroupées par Marc HINDRY et Henri PEZERAT (CNRS/Jussieu) ; non publiées. Figure 1 : Evolution du tonnage d’amiante importé chaque année en France
II - LES DANGERS DE L’AMIANTE 2.1. La mise en évidence des nuisances provoquées par l’amiante. En Grande Bretagne , les dangers de l’amiante ont été débattus très tôt ; la première réglementation remonte à 1931. La fixation d’une première valeur moyenne de concentration en fibres d’amiante dans l’air (2 fibres par cm3) date de 1969. De manière inattendue, les premières actions contre l’amiante ont été conduites en Grande Bretagne par des locataires qui luttaient contre la pollution des logements par l’amiante (People’s Asbestos Action Campain). De nombreux logements sociaux ont été construits dans les années 60 avec des matériaux à base d’amiante. Ces matériaux se désagrègent lentement et polluent l’atmosphère. Des études épidémiologiques sont alors conduites auprès des salariés qui ont participé à la construction de ces logements. Aux Etats Unis, la suspicion du pouvoir cancérogène de l’amiante (cancer bronchique associé à une asbestose) s’exprime dès 1935. Plusieurs autres cas de cancers broncho-pulmonaires sont rapportés, les années suivantes, aux Etats Unis mais également en Grande Bretagne, en Allemagne et en France (1941). Mais ce n’est qu’en 1955 qu’une étude de DOLL en Angleterre, dans une usine textile d’amiante, apporte la preuve épidémiologique de cet effet. Elle est confirmée en 1964, puis en 1976, par le Pr SELIKOFF à New York, qui a réalisé une étude portant sur 17800 travailleurs américains et canadiens de l’isolation (659 décès par cancers broncho-pulmonaires observés pour 209,3 attendus). Plus de 50 000 actions en justice sont engagées, par des travailleurs ou leurs familles, contre les compagnies qui ouvragent de l’amiante. Des municipalités se retournent contre les entreprises de l’amiante afin d’assurer le déflocage des locaux (écoles notamment). En France, dès 1906, le Bulletin de l’Inspection du Travail, sous la signature de M. AURIBAULT (Inspecteur Départemental du Travail à Caen), décrivait les premiers cas mortels d’asbestose survenus parmi les travailleurs, après quelques années d’exposition dans l’usine de Condé-sur-Noireau créée en 1890, en Normandie (une cinquantaine de décès survenus entre 1890 et 1895). Toutefois, la prise en compte réelle du "risque amiante" est bien plus tardive. Si les atteintes bénignes font l’objet en 1945 d’un tableau de maladie professionnelle, les premières préoccupations relatives aux cancers provoqués par l’amiante remontent à 1974/75. Elles s’exprimeront à l’occasion d’une affaire banale de dépôt de bilan qui concerne, à Clermont-Ferrand, une entreprise de taille moyenne (271 salariés dont 200 femmes) : la Société AMISOL. Spécialisée dans la fabrication de textile d’amiante (fils, cordons, joints, tresses, bourrelets, gaines, bandes, rubans, tissus, etc.), la Société AMISOL, qui offrait à ses employés une sécurité d’un autre âge, préfère déposer le bilan plutôt que de remettre à niveau des ateliers délabrés. Les salariés qui s’opposent à leur mise à pied occupent l’usine en décembre 1974. De manière fortuite, l’atteinte des premières victimes se manifeste durant l’occupation des ateliers et plusieurs salariés décèdent (12 décès durant les 31 mois d’occupation d’usine). Des recherches conduites ultérieurement par les salariés eux-mêmes montrèrent qu’en fait, il ne s’agissait pas des premières victimes, car d’autres décès, survenus auparavant, étaient également liés à l’exposition à l’amiante. Nous devons l’émergence du problème "cancer" et sa visibilité sociale au Collectif Jussieu qui a travaillé en liaison avec les travailleurs d’AMISOL. Toutefois, cela ne suffira pas pour imposer, de manière réglementaire, des règles de prévention ou pour élargir le champ de la réparation. Il faudra attendre l’action d’un collectif intersyndical de chercheurs et universitaires de Jussieu (CFDT, CGT, FEN) qui ont engagé une vigoureuse action en 1975 contre le flocage à l’amiante de très nombreux locaux de l’Université parisienne, et la campagne lancée par la revue de consommateurs "Que choisir ?" sur le thème de "l’amiante dans le vin", pour que les pouvoirs publics et l’Industrie de l’amiante se mettent en quête de solutions. La réglementation va alors évoluer, tant en matière de prévention que de reconnaissance des maladies professionnelles. Cet ensemble d’événements suscitera progressivement des actions d’information, de formation et de dépistage de pathologies pulmonaires auprès des travailleurs exposés professionnellement. C’est ainsi que, par exemple, dans le cadre d’un dépistage de l’asbestose, portant sur l’ensemble des personnels des centrales thermiques de l’EDF, l’examen de 8240 clichés radiographiques pulmonaires effectués entre 1976 et 1980 a mis en évidence, pour 5% d’entre eux, une atteinte du tissu pulmonaire ou de la plèvre en rapport avec l’amiante. 2.2. Les effets de l’amiante sur l’appareil respiratoire. Les fibres d’amiante présentent des dangers qui varient avec le groupe (serpentine ou amphibole) auquel elles appartiennent. Suivant le mécanisme en cause, ces fibres entraînent des dysfonctionnements cellulaires différents. Ø Les fibroses Elles résultent du dérèglement fonctionnel de certaines cellules appelées "fibroblastes". au niveau du poumon, la fibrose s’appelle aussi asbestose. Cette appellation vient du nom "asbeste" (du grec asbestos - inextinguible - et du latin asbestes - minéral incombustible - amiante) qui est un silicate amphibole, fibreux, dont l’amiante est la variété la plus pure. Il est à l’origine du nom de deux villes importantes par leurs mines d’amiante : Asbest dans l’Oural, en Russie et Asbestos dans le Québec au Canada. Le délai d’apparition de l’asbestose est long (15 à 20 ans en moyenne). Son évolution est lente mais irréversible. Le dépistage associe à l’examen clinique des examens fonctionnels respiratoires (EFR) et des radiographies pulmonaires. Les EFR permettent de déceler les troubles respiratoires et les anomalies d’échanges gazeux au niveau des alvéoles. Les radiographies pulmonaires doivent être lues par des spécialistes entraînés, car les signes de fibrose débutante sont discrets et 20% environ des asbestoses peuvent être invisibles par radiographie et révélées par des EFR. Cette fibrose pulmonaire réduit la capacité du poumon à assurer une oxygénation correcte de l’organisme et entraîne une surcharge cardiaque : au niveau de la plèvre, cette fibrose va provoquer un épaississement des feuillets ou, par endroits, des zones calcifiées appelées "plaques pleurales". Ø Les cancers L’action cancérigène de tous les types d’amiante concerne deux types de cellules : les cellules du revêtement des bronches (cellules épithéliales), et on parle de cancer bronchique ou de cancer du poumon ; les cellules du revêtement des deux feuillets de la plèvre. Le cancer ainsi provoqué, qui est une affection rare, s’appelle "mésothéliome". Ce type de cancer peut aussi se développer au niveau d’une enveloppe, de même nature que le feuillet de la plèvre, le péritoine, qui tapisse les parois intérieures de la cavité abdominale, ou au niveau de la membrane qui enveloppe le coeur. La forme physique des fibres minérales d’amiante fait qu’elles présentent des difficultés pour migrer au travers des vaisseaux sanguins et lymphatiques. Il en résulte une rétention dans les enveloppes séreuses (plèvre, péritoine). Cette difficulté d’élimination augmente l’effet toxique de la fibre. Dès 1948, des formes pleurales (15%) étaient mises en évidence parmi les cancers provoqués par l’amiante. C’est également le Pr SELIKOFF, à New-York, qui, en 1965, découvre, sur une série de 2500 cas d’autopsies, 26 cas d’asbestoses dont 4 avec mésothéliome pleural et 3 avec mésothéliome péritonéal. En 1976, dans son étude américano-canadienne, il met en évidence 36 mésothéliomes pleuraux et 67 péritonéaux. La manifestation de ce type de cancer est très tardive ; la médiane des temps de latence (temps au bout duquel la moitié des affections se sont exprimées) est d’environ 35 ans. 2.3. Les travaux susceptibles d’entraîner une exposition à l’amiante. Le nombre de salariés qui ont été exposés à l’amiante est probablement important et on évalue, de manière non exhaustive, à environ 3000 le nombre des différentes utilisations de l’amiante. Une liste des "travaux types" susceptibles d’entraîner une exposition à l’amiante a été publiée en France en 1994. Nous l’avons reprise en la complétant par plusieurs exemples concrets d’utilisations. 1. Extraction ou traitement du minerai. 2. Manutention (stockage, transport, déchargement, ...) ou utilisation d’amiante en vrac ou de matériaux contenant de l’amiante comme des enduits de rebouchage ou de lissage, des pâtes ciment-amiante utilisées comme "chevilles", etc. 3. Fabrication d’objets avec de l’amiante : fibrociment, garnitures de freins, coque plastique de batterie automobile, filtres, textiles amiantés, calorifuges, joints, tresses, revêtements de sols, etc. 4. Flocage de plafonds, de structures métalliques, de parois, etc, en vue d’un isolement thermique ou phonique, mais surtout d’une protection contre le feu. 5. Intervention (pose, dépose, entretien) sur des isolations autour de sources de chaleur fixes (fours domestiques, de laboratoires ou industriels, tuyaux, chaudières, turbines, ...). 6. Intervention (usinage, entretien, pose, dépose, réparation, ...) sur des produits manufacturés contenant de l’amiante tels que plaques de fibrociment, garnitures de freins, filtres, gaines de câbles électriques floquées, matériel d’isolation thermique ou acoustique, etc. 7. Interventions, sur des bâtiments contenant des matériaux en amiante (flocage, faux-plafonds, simili-ardoise, panneaux et tuyaux en fibrociment, ...), telles que meulage, perçage, pose ou retrait de câbles, ponçage d’enduits, etc. Exposition passive à proximité d’un poste occasionnant une pollution. 8. Démolition non spécifique incluant des matériaux à base d’amiante. 9. Protection individuelle contre la chaleur (vêtements, gants, heaumes), les aérosols (masques à cartouche de papier amianté,...). 10. Protection du poste contre la chaleur ou les chocs thermiques par un accessoire utilisé comme instrument de travail (Ex. : plaques d’amiante des soudeurs et oxycoupeurs, des joailliers, des orfèvres, des verriers, des plombiers-tuyauteurs, tables à repasser des blanchisseuses, etc.). 11. Exposition indirecte par intervention sur des machines contenant des pièces en amiante (joints d’étanchéité, filtres, joints de dilatation dans la sidérurgie, etc). 12. Exposition passive liée à la dégradation de matériaux en amiante (flocage, rideau, air passant au travers de filtre d’amiante, etc.). 13. Manutention d’objets en amiante (stockage, transport, déchargement, ...) ou de vêtements de travail souillés par des fibres d’amiante (laveries industrielles). 14. Nettoyage industriel (au moyen de machines tournantes) des revêtements de sols constitués de plastiques renforcés en fibres d’amiante ("DALAMI"). Certaines opérations comme, par exemple, le découpage et le chanfreinage des plaques d’amiante-ciment à la disqueuse, ou le nettoyage à l’air comprimé des freins à disques ou à tambour (le "coup de soufflette" des garagistes) peuvent conduire, en des délais très brefs, à des "pics" d’exposition très importants associés à des contaminations significatives des locaux et vêtements de travail par des fibres d’amiante. Il faut également souligner les contaminations domestiques et familiales dues au réemploi, par les salariés des entreprises transformatrices de l’amiante, des sacs de coton, de jute ou de plastique ayant contenu de l’amiante en vrac. Il nous a même été signalé la confection de "couches" pour bébés réalisées à partir de sac de coton ayant renfermé de l’amiante en vrac, et le mésothéliome d’une coiffeuse qui avait pour clientes les ouvrières d’une usine à Pontault-Combault. III - STATISTIQUES DES MALADIES PROFESSIONNELLES PROVOQUEES PAR L’AMIANTE. En France, un an après le début de "l’affaire AMISOL", le tableau 30 est modifié par décret (5 janvier 1976), afin de permettre la prise en charge du cancer de la plèvre (mésothéliome) qui est reconnu comme étant spécifiquement lié à l’inhalation de fibres d’amiante. Cependant, le cancer broncho-pulmonaire n’est pris en charge que dans le cas où il s’exprime sur un fond d’asbestose présentant des signes radiographiques et des troubles fonctionnels respiratoires. En juin 1985, le tableau 30 sera de nouveau modifié pour permettre la reconnaissance des cancers broncho-pulmonaires provoqués par l’inhalation de fibres d’amiante. Si cette atteinte n’est plus considérée comme une "complication" de l’asbestose, la relation avec l’amiante doit être "médicalement caractérisée". Cette disposition a fait l’objet, à l’occasion de deux recours individuels soutenus par la FNATH, d’annulations par le Conseil d’Etat, de décisions de refus de reconnaissance prononcées par des Caisses Primaires d’Assurance Maladie (CPAM) et confirmées par les tribunaux compétents. Une telle restriction a été jugée comme étant contraire au principe de "présomption d’origine professionnelle de l’affection" dès lors que la preuve de l’exposition habituelle à l’agent toxique a été apportée. Le 22 mai 1986, le tableau 30 est à nouveau modifié par décret. Les restrictions contestées par le Conseil d’Etat sont retirées, mais le cancer broncho-pulmonaire fait l’objet d’un tableau distinct (le 30bis) doté d’une liste limitative de travaux et d’une durée d’exposition portée de 5 à 10 ans. Contrairement au mésothéliome, considéré comme étant provoqué quasi-exclusivement par l’amiante, le cancer broncho-pulmonaire a été analysé comme étant une affection à causes multifactorielles. Ceci est dû au fait que l’on ne dispose pas aujourd’hui de critères médicaux fiables permettant de désigner clairement le ou les agents toxiques qui ont provoqué le cancer du poumon. L’hypothèse de l’atteinte plurifactorielle conduit alors, compte tenu du cadre législatif (article L461-2 du Code de la Sécurité Sociale), à considérer les poussières d’amiante comme une "ambiance de travail", hypothèse qui implique une liste limitative de travaux et d’une durée d’exposition portée de 5 ans à 10 ans . 3.1. Données statistiques de la CNAM Construits sur la base des données statistiques publiées par la Caisse Nationale d’Assurance Maladie (CNAM), les tableaux IIA et IIB donnent, pour les salariés du Régime Général de la Sécurité Sociale, en activité ou non, l’évolution du nombre d’affections professionnelles reconnues. En dehors des cas d’expositions importantes et chroniques, ces affections se manifestent environ 25 à 45 ans après le début de l’exposition. Pour des expositions faibles, ce temps de latence peut être encore plus long. Ceux-ci s’observent notamment pour des expositions à faible niveau comme pour les contaminations environnementales constatées au Nord-Est de la Corse dans la population (non-exposée professionnellement) située à plusieurs kilomètres de la mine de Canari. Le tableau IIA, concernant les asbestoses reconnues dans les trente années qui suivirent la création du premier tableau (2/08/45) de maladies provoquées par l’amiante, montre que le nombre d’atteintes reconnues est extrêmement faible dans les 20 premières années. Ceci est dû à l’introduction, en 1950 et 1951, de conditions de reconnaissances extrêmement sévères qui constituent un frein terriblement efficace pour réduire la prise en charge des atteintes professionnelles, mais aussi des délais de latence importants qui caractérisent ces affections. tableau IIA : Asbestoses provoquées en France par l’amiante et reconnues au titre du tableau 30 de 1948 à 1977 année 1948 1949 1950 1951 1952 1953 1954 1955 1956 1957 nombre d’asbestoses 4 8 0 1 8 nombre de décès - - - - - - - - 0 0 année 1958 1959 1960 1961 1962 1963 1964 1965 1966 1967 nombre d’asbestoses 3 0 4 3 2 1 3 9 7 6 nombre de décès 0 0 0 1 0 0 1 0 1 0 année 1968 1969 1970 1971 1972 1973 1974 1975 1976 1977 nombre d’asbestoses 18 13 6 12 22 24 41 37 54 77 nombre de décès 2 0 0 1 0 1 0 3 £ 7 £ 8 Nota : Ø les décès n’apparaissent dans les statistiques de la CNAM qu’à compter de 1956. Ø à compter de 1976, surviennent les premières reconnaissances d’affections cancéreuses. Les décès consécutifs aux asbestoses ne sont pas distingués dans les statistiques de la CNAM, de ceux provoqués par des cancers. Sources :statistiques annuelles de la Caisse Nationale d’Assurance Maladie (CNAM). C’est à partir de 1974-1975 que le nombre d’atteintes reconnues augmente significativement. Le tableau IIB montre l’évolution du nombre de maladies professionnelles provoquées par l’amiante et notamment la croissance des affections cancéreuses inscrites pour la première fois au tableau n° 30 en janvier 1976. Les données épidémiologiques montrent que, pour 1 mésothéliome provoqué par l’amiante, on observe en moyenne, entre 1,5 et 2 cancers broncho-pulmonaires. Or, en comparant le nombre total de mésothéliomes reconnus par les CPAM entre 1990 et 1995 (439 cas) à celui des cancers broncho-pulmonaires pour la même période (182 cas), le rapport obtenu est égal à 0,41. Le déficit de reconnaissance peut donc être estimé comme étant compris entre 550 et 690 cancers du poumon, soit en moyenne 80 à 116 victimes non reconnues chaque année, du moins si le chiffre de mésothéliomes reconnus était proche de la réalité.... ce qui est loin d’être le cas. tableau IIB : Maladies professionnelles - MP - provoquées, en France, par l’amiante et reconnues au titre des tableaux 30 et 30 bis (Régime Général) de 1976 à 1995 année total des "mp" reconnues fibroses lésions pleurales bénignes total des fibroses et lésions mesotheliomes cancers broncho-pulmonaires autres tumeurs total des cancers* total des décès** 1976 54 48 4 2 6 7 1977 77 66 6 5 11 8 1978 100 81 12 7 19 8 1979 127 95 21 11 32 14 1980 149 116 20 13 33 14 1981 159 130 22 7 29 20 1982 190 167 17 6 23 15 1983 179 150 20 9 29 17 1984 211 173 173 22 16 38 14 1985 202 153 24 177 25 0 0 25 8 1986 250 174 37 211 33 4 2 39 17 1987 262 177 52 229 28 2 3 33 21 1988 324 194 74 268 39 11 6 56 17 1989 348 210 75 285 49 13 1 63 28 1990 396 181 137 318 57 13 8 78 29 1991 492 189 222 411 56 21 4 81 24 1992 507 173 244 417 56 29 5 90 29 1993 544 171 272 443 77 21 3 101 31 1994 727 212 389 601 84 33 9 126 33 1995 817 166 477 643 109 65 0 174 36 * créé en 1945, le tableau n°30 comporte pour la première fois, le 5 janvier 1976, une affection cancéreuse. Il a, par la suite, été modifié en juin 1985 pour prendre en charge les cancers broncho-pulmonaires. **le nombre des décès comptabilisés dans les statistiques de la CNAM ne prend en compte que les décès survenus dans l’année de reconnaissance de la maladie. La mortalité totale due aux maladies professionnelles est environ 4,1 fois supérieure à l’ensemble des décès comptabilisés suivant le critère précédent (moyenne entre 1976 et 1995). Sources : statistiques annuelles de la Caisse Nationale d’Assurance Maladie des Travailleurs Salariés (CNAMTS). La figure 2 illustre la progressive et importante augmentation du nombre d’affections professionnelles provoquées par l’amiante. Depuis 1975, le nombre total de maladies professionnelles provoquées par l’amiante, et reconnues par le Régime Général de la Sécurité Sociale, augmente régulièrement d’une quinzaine de cas par an. Depuis 1987, cette augmentation annuelle moyenne est pratiquement multipliée par quatre, tandis que le nombre de cancers reconnus augmente, d’une année sur l’autre, d’une douzaine de cas par an en moyenne. figure 2 : Maladies professionnelles provoquées, en France, par l’amiante
3.2. Les cancers dus à l’amiante, comparés à l’ensemble des cancers professionnels. Comme l’indique le tableau III, le nombre de cancers attribuables à l’amiante représente, pour les statistiques des cinq dernières années publiées, la moitié de l’ensemble des affections cancéreuses d’origine professionnelle reconnues par les Caisses Primaires. Les décès associés aux cancers de l’amiante constituent également, pour la même période, la moitié des décès provoqués par l’ensemble des cancers professionnels, avec le critère comptable particulier de la CNAM (déjà souligné en nota du tableau IIb). tableau iii :Cancers professionnels provoqués par l’amiante et décès associés comparaison avec ceux relatifs à l’ensemble des maladies professionnelles - année nombre total de cancers reconnus nombre de décès associés nombre de cancers dus à l’amiante nombre de décès dus à l’amiante 1977 56 à 65 (*) 23 11 (18,2%) (**) 8 (34,8%) (**) 1978 59 à 71 28 19 (29,2%) 8 (28,6%) 1979 66 à 83 29 32 (43,0%) 14 (48,3%) 1980 63 à 83 36 33 (45,2%) 14 (38,9%) 1981 81 à 93 46 29 (33,3%) 20 (43,5%) 1982 78 à 88 37 23 (27,7%) 15 (40,5%) 1983 83 à 98 45 29 (32,0%) 17 (37,8%) 1984 111 à 115 43 38 (33,6%) 14 (32,6%) 1985 94 à 100 39 25 (25,8%) 8 (20,5%) 1986 108 à 116 48 39 (34,8%) 17 (35,4%) 1987 102 à 111 45 33 (31,0%) 21 (46,7%) 1988 110 à 122 57 56 (48,3%) 17 (29,8%) 1989 110 à 123 56 63 (54,1%) 28 (50,0%) 1990 136 à 146 44 78 (55,3%) 29 (65,9%) 1991 163 à 174 41 81 (48,1%) 24 (58,5%) 1992 151 à 169 56 90 (56,3%) 29 (51,8%) 1993 167 à 177 60 101 (58,7%) 31 (51,7%) 1994 204 37 126(61,8%) 33 (52,4%) 1995 254 44 174(68,5 %) 36(58,1 %) (*) Comme les statistiques de la CNAMTS sont insuffisamment détaillées (affections cancéreuses additionnées, pour certains tableaux à des affections bénignes), le nombre total des cancers reconnus est affecté d’une incertitude que l’on calcule. A partir de 1994, les statistiques fournissent, pour chaque affection, le nombre de cas reconnus, d’IPP et de décès. (**) Pourcentages des cancers et des décès, dus à l’amiante, comparés à l’ensemble de ceux des tableaux de maladies professionnelles. Sources : statistiques annuelles de la CNAMTS La figure 3 montre l’évolution du nombre total de cancers professionnels reconnus, en France, chaque année. Les incertitudes qui affectent chaque point sont dues au fait que les statistiques annuelles de la CNAMTS regroupent, pour certains tableaux, dans une même rubrique, un type de cancer avec une affection non cancéreuse. Le nombre de cancers d’un certain type est, dans ce cas, compris entre zéro et le nombre relatif aux autres affections non différenciées. figure 3 :Evolution du nombre total de cancers professionnels reconnus annuellement en France au titre du Régime Général de la Sécurité Sociale L’évolution observée pour l’ensemble des cancers montre que, de 1977 à 1989, le nombre d’affections reconnues a doublé en 12 ans. cinq à six ans plus tard, en 1994-95, il y avait 4 fois plus de cancers reconnus qu’en 1977, parmi les 14,5 millions de salariés qui relèvent du Régime Général de la Sécurité Sociale. Dans cette évolution, l’augmentation du nombre de cancers attribuables à l’amiante a joué un rôle incontestable. En 1993-95, les statistiques de la CNAM montrent qu’en moyenne, 6 cancers professionnels, sur 10 reconnus, ont été provoqués par l’amiante. 3.3. Répartition géographique et par branche professionnelle, des affections dues à l’amiante.
Les statistiques annuelles de la CNAM sont données suivant une double répartition : par branche professionnelle (15 branches d’activité) et suivant une répartition géographique particulière (16 circonscriptions - les Caisses Régionales CRAM). Ø les branches professionnelles L’analyse du taux de maladies professionnelles reconnues, dues à l’amiante, (exprimé en nombre de MP pour 100 000 travailleurs du secteur d’activité considéré) devrait, en principe, nous permettre de déceler les professions à risques. En fait, cette approche est partiellement inopérante, dans la mesure où un nombre important de MP reconnues par les diverses CRAM n’est pas, (pour des raisons techniques et surtout financières) formellement classé dans l’une des 15 branches professionnelles. Cependant, malgré ce biais, deux secteurs professionnels émergent très sensiblement : le " caoutchouc - papier - carton", les industries des "pierres et terres à feu". Dans le premier secteur, on trouve effectivement dans la nomenclature de la CNAM, les activités suivantes : "fabrication de papier et carton d’amiante, de plaques filtrantes en amiante, de feuilles pour jouets en amiante ( ?), de garniture de friction en amiante, la transformation d’articles de filature en amiante, de produits en amiante". Le taux observé pour les "pierres et terres à feu" est dû au groupement "fabrication de produits en amiante-ciment". Le tableau IV et la figure 4 montrent bien, entre 1982 et 1995, malgré des fluctuations importantes, que les taux de MP reconnues dues à l’amiante, calculés pour les deux branches professionnelles, sont significativement supérieurs au taux moyen concernant l’ensemble des salariés du Régime Général pour les mêmes MP. tableau iv :Evolution du taux de maladies professionnelles provoquées par l’amiante pour différentes branches professionnelles. - taux pour 100 000 salariés - Branche d’activité 1982 1983 1984 1985 1986 1987 1988 1989 1990 1991 1992 1993 1994 1995 Caoutchouc, papier, carton 12,74 11,79 14,27 8,28 11,68 13,06 14,24 13,23 23,30 17,88 20,88 19,33 22,08 9,3 Pierres, terres à feu 7,72 6,25 8,71 13,09 23,6 18,79 25,21 10,65 8,49 14,86 13,50 15,53 19,35 15,2 Ensemble des salariés 1,35 1,30 1,56 1,49 1,90 1,97 2,36 2,48 2,75 3,41 3,51 3,85 5,09 5,63 Nota :les taux par branche sont sous-évalués car, entre 1988 et 1995, six victimes sur dix (59,6 %) en moyenne, n’ont pas fait l’objet d’un classement dans leurs branches d’activité d’origine du fait de la disparition de l’entreprise où elles ont été exposées ou d’une exposition subie dans 2 entreprises ou plus. En 1993-1995, deux victimes sur trois (66,0 %) ne sont pas imputées au dernier employeur. figure 4 : Evolution, pour différentes branches professionnelles, du taux de maladies professionnelles dues à l’amiante
Ø les circonscriptions géographiques : En considérant les 16 circonscriptions de la CNAM, il est possible de calculer le taux moyen de reconnaissance des maladies professionnelles provoquées par l’amiante. Ce taux moyen augmente progressivement de 1982 à 1995 notamment. Trois circonscriptions présentent des taux significativement supérieurs à la moyenne. Les taux calculés sont donnés dans le tableau V. tableau v :Evolution du taux de
maladies professionnelles provoquées par l’amiante en
fonction des circonscriptions géographiques des CRAM
circonscriptions CRAM (n° des départements) 1982 1983 1984 1985 1986 1987 1988 1989 1990 1991 1992 1993 1994 1995 rouen (N°14, 27, 50, 61, 76) 6,50 6,18 8,58 6,47 5,62 8,63 9,82 13,28 13,19 14,37 15,13 16,73 19,84 22,9 nantes (N°44, 49, 53, 72, 85) 3,19 1,42 2,51 2,43 2,38 2,31 3,1 7,33 6,07 13,90 15,60 16,59 21,24 20,2 lille (N° 2, 59, 60, 62,80) 1,47 1,49 1,87 2,64 2,54 4,72 5,11 3,30 4,37 6,06 5,62 4,55 8,10 7,91 ensemble des 16 cram 1,35 1,30 1,56 1,49 1,90 1,97 2,36 2,48 2,75 3,41 3,51 3,85 5,09 5,63 L’évolution, pour différentes circonscriptions géographiques du taux de MP dues à l’amiante - figure 5 - montre notamment l’importance de la circonscription de Rouen (5,2 % des salariés de la CNAM), dans laquelle sont reconnues 21,2 % de la totalité des MP, dues à l’amiante, reconnues en France, en 1993 et 1994, au titre des tableaux 30 et 30bis. figure 5 :Evolution, pour différentes circonscriptions géographiques, du taux de maladies professionnelles provoquées par l’amiante.
Il serait très utile de disposer de chiffres détaillés, département par département, afin de mieux cerner les zones à risques, telles que les chantiers navals, l’industrie métallurgique ou les usines dans lesquelles l’amiante était la matière ouvragée principale (usines d’amiante-ciment, de garnitures de freins, d’embrayages, de matières plastiques à mouler, etc....). 3.4. Aspects économiques de la prise en charge des maladies provoquées par l’amiante Le nombre de maladies professionnelles reconnues dans le cas de l’exposition à un toxique ne permet pas, à lui seul, d’évaluer l’impact économique de la réparation. Pour estimer cet impact, ce facteur, de manière relative, nous allons calculer la fraction du nombre d’incapacités permanentes partielles (IPP) qu’entraînent les atteintes attribuables aux fibres d’amiante, par comparaison avec le nombre total d’IPP consécutives à la reconnaissance de toutes les maladies professionnelles provoquées. Parallèlement, nous allons rechercher, pour les 12 dernières données statistiques annuelles, données au tableau VI, sur qui repose le poids financier de la réparation. tableau vi : Impacts économiques des maladies professionnelles provoquées par l’amiante année nombre de mp reconnues pour tous tableaux nombre de mp reconnues aux tableaux 30 et 30 bis nombre de mp non-imputées à une "branche" nombre d’ipp consécutives à l’ensemble des tableaux nombre d’ipp dues aux tableaux n°30 et 30 bis 1984 5 018 211 (4,2%) 38 (18,0%) 64 010 8 717 (13,6%) 1985 4 611 202 (4,4%) 53 (26,2%) 60 750 8 625 (14,2%) 1986 4 085 250 (6,1%) 56 (22,4%) 56 401 9 943 (17,6%) 1987 3 531 262 (7,4%) 75 (28,6%) 48 143 10 535(21,9%) 1988 3 972 324 (8,2%) 127 (39,2%) 56 353 13 562 (24,1%) 1989 4 032 348 (8,6%) 179 (51,4%) 51 470 14 971 (29,1%) 1990 4 417 396 (9,0%) 205 (51,8%) 54 035 14 940 (27,6%) 1991 5 080 492 (9,7%) 303 (61,6%) 57 380 16 470 (28,7%) 1992 6 533 507 (7,8%) 324 (63,9%) 62 164 16 781 (27,0%) 1993 6 598 544 (6,3%) 364 (66,9%) 59 262 18 005 (30,4%) 1994 7 500 727 (9,7 %) 486 (66,9 %) 65 692 21 013 (32,0 %) 1995 8 380 817 (9,7 %) 559 (68,5 %) 77 067 26 165 (34,0 %) ð Le nombre de maladies professionnelles, reconnues au titre des tableaux 30 et 30 bis lors des 12 dernières années (pour lesquelles nous disposons des données statistiques), représente 4,2 à 9,7 % de l’ensemble des MP reconnues. Leurs conséquences économiques mesurées par le nombre d’IPP dû aux atteintes de l’amiante est, pourtant, bien plus important, car les seuls tableaux 30 et 30 bis entraînent le versement de 13,6 % à 34,0 % du nombre total d’IPP versées pour l’ensemble des maladies professionnelles reconnues. ð En considérant la ventilation par "branche professionnelle", il apparaît que les affections, qui n’ont pas été imputées à l’une des 15 branches définies par la CNAM, augmentent progressivement et atteignent en 1993 deux maladies reconnues sur trois. Ceci est dû principalement au fait que les Caisses Primaires financent, au moyen d’un fond commun, la réparation des maladies induites par des travaux effectués dans deux entreprises (ou plus). La recherche de responsabilité des employeurs n’est plus engagée. Dans le contexte généralisé du travail intérimaire ou des contrats à durée déterminée, cette disposition du Code de la Sécurité Sociale entraînera un manque total de visibilité sur les branches ou entreprises qui produisent des affections professionnelles. L’absence de "sanction économique" conduit à s’interroger sur l’effet, que l’on dit être incitatif, de la "réparation" sur la "prévention des maladies professionnelles". 3.5. Les atteintes professionnelles hors du "Régime Général" de la Sécurité Sociale ð Les Chantiers navals Les données concernant le Chantier Naval militaire de Cherbourg - tableau VII - montrent que les taux de maladies professionnelles reconnues comme étant provoquées par l’amiante sont 15 à 35 fois supérieurs aux taux les plus élevés évoqués précédemment (tableau IV). L’importance de ce taux est peut-être liée au fait que le nombre de maladies professionnelles reconnues est rapporté à une population à risque bien cernée, tandis que les taux par "circonscription géographique" ou par "branche professionnelle" de la CNAM englobent des salariés qui n’ont pas été exposés à l’amiante. tableau vii : Evolution du nombre de maladies professionnelles provoquées par l’amiante et "reconnues" au Chantier Naval militaire de Cherbourg année 1988 1989 1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 Actifs 15 8 14 12 6 10 15 9 35 Retraités 6 8 8 1 6 14 13 18 28 Total MP déclarées 21 16 22 13 12 24 28 27 63 Total MP reconnues 15 33 13 32 13 18 24 30 28 Effectifs* 4850 4700 4875 4900 4850 4850 4660 4178 4000 Taux pour 100 000 actifs 309 702 267 653 268 371 515 718 700 *) effectif moyen des personnels civils en activité. Sources : Commission "Environnement - Santé" de l’UIS-CFDT de Cherbourg Pour les années 1977 à 1987, il y a eu 134 affections déclarées et 63 "reconnues", soit un taux moyen de reconnaissance égal à 47,0%. Calculé sur une période plus longue, 1977 à 1996, ce taux moyen est significativement augmenté, car il atteint 85,0%. ð Les MinesL’analyse du taux d’affections - tableau VIII - provoquées chez les mineurs (charbon, fer, potasse, uranium, etc.) qui disposent d’un système de protection sociale particulier, montre une augmentation très importante du taux de maladies professionnelles en 1992-93 et surtout en 1993. Cette augmentation concerne essentiellement les mines de charbon (100 maladies professionnelles reconnues sur 106 en 1993). tableau viii :Maladies professionnelles provoquées par l’amiante dans les mines année 1983 1984 1985 1986 1987 1988 1989 1990 1991 1992 1993 1994 1995 MP reconnues* 5 7 10 5 4 9 12 11 12 23 106 11 14 Mineurs en activité 84984 78547 73188 65775 59005 51311 45435 40839 36168 31816 29835 27559 26185 Taux pour 100 000 mineurs actifs 5,9 8,9 13,7 7,6 6,8 17,5 26,4 26,9 33,2 72,3 355 39,9 53,5 *actifs et retraités Sources : Caisse Autonome Nationale de la Sécurité Sociale dans les Mines (CANSSM) Il est frappant de constater que le taux d’affections professionnelles provoquées par l’amiante est, pour les mineurs en progression nette entre 1992 et 1993, tout en restant, en moyenne, du même ordre que les taux observés pour les branches industrielles les plus sévèrement exposées. Une fracture apparaît pour les deux dernières années, où les taux s’envolent. En fait, l’augmentation de 1992 et surtout celle de 1993 vient d’une campagne de dépistage faite auprès d’anciens salariés du groupe "Charbonnage de France" à Carmaux.Cette usine produisait de l’amoniac et ses dérivés. Le groupe "Charbonnage de France" avait 4 usines de ce type en France. Une campagne de dépistage va être lancée sur un autre site à Carling en Moselle. En outre, les taux calculés sont de plus en plus surévalués du fait de la très forte réduction de la population des mineurs en activité (de l’ordre de 400 000 mineurs dans les années 50 à environ 28 000 en 1993-95). IV - DONNEES DE L’INSERM SUR LA MORTALITE PAR MESOTHELIOME ET PAR ASBESTOSE EN FRANCE 4.1. La mortalité par mésothéliome Comme le cancer primitif de la plèvre est réputé être provoqué presque exclusivement par les fibres d’amiante, il est intéressant de comparer l’évolution de la mortalité provoquée par cette affection dans toute la population française avec le nombre de mésothéliomes reconnus au titre des maladies professionnelles du Régime Général. Les données pour l’ensemble de la population française sont fournies par l’INSERM. L’évolution du nombre total de décès par cancer de la plèvre en France - tableau IX - montre une croissance continue illustrée par la figure 6. De la fin des années 1960 (moyenne 1968 à 1970) au début des années 1990 (moyenne 1992 à 1994), le nombre total des décès est multiplié par 2,58. Comme l’illustre bien la figure, cette augmentation du nombre de décès est significativement plus importante chez l’homme (3,20) que chez la femme (1,75). La mortalité survenue entre 1968 et 1994 présente en outre un "sexe ratio" (H/F) égal à 1,96. Plusieurs études montrent que pour environ 80% des décès, on dispose d’informations concernant une exposition professionnelle à l’amiante. tableau ix : Evolution du nombre de décès par mésothéliome dans l’ensemble de la population française de 1968 à 1993 année 1968 1969 1970 1971 1972 1973 1974 1975 1976 1977 1978 1979 1980 1981 homme 199 208 189 232 213 249 253 299 283 333 301 347 365 363 femme 121 176 152 172 166 167 191 180 181 177 187 193 196 228 total 320 384 341 404 379 416 444 479 464 510 488 540 561 591 année 1982 1983 1984 1985 1986 1987 1988 1989 1990 1991 1992 1993 1994 homme 416 434 469 492 541 544 564 584 602 581 630 667 609 femme 203 213 198 217 254 239 235 225 272 264 272 237 278 total 619 647 667 709 795 783 799 809 874 845 902 904 887 Sources : Statistiques de l’INSERM (CIM 9 code 163) figure 6 : Evolution du nombre de décès par mésothéliome, en France
On observe, de 1976 à 1994, une lente progression du nombre des décès (doublement en 17 ans) opposée à une progression rapide des mésothéliomes reconnus (multiplié par 20). Le nombre de ces derniers demeurant cependant au plus, en 1994, égal au 1/10 des décès par mésothéliome survenus dans l’ensemble de la population française (84 cas pour 887 décès). En 1994, la population active en France comportait 24,8 millions de personnes parmi lesquelles 14,14 millions de salariés du Régime Général (soit 57%). En supposant que 80% (taux de mortalité réputé lié à l’exposition à l’amiante) des 887 décès par mésothéliomes, dénombrés par l’INSERM en 1994, se répartissent proportionnellement au nombre des grandes catégories d’actifs, environ 404 décès (887 x 80% x 57 %) sont imputables aux salariés de la CNAM. Or, en 1994, seuls 84 cas de mésothéliomes ont été reconnus, soit une sous-estimation d’un facteur 4,8. 4.2. La mortalité par asbestose L’asbestose, fibrose pulmonaire irréversible, a été la première des affections professionnelles reconnue en France, et au niveau international, comme étant provoquée par l’inhalation de poussières d’amiante. Le tableau IIB indique que le nombre d’asbestoses reconnues par les CRAM de 1984 à 1994 est pratiquement constant : 182 ± 30 cas par an. Comme les statistiques de décès par maladies professionnelles de la CNAMTS ne sont pas, pour un même tableau, détaillées en fonction du type de l’affection, nous avons examiné l’évolution de la mortalité par asbestose dans la population française (mortalité qui ne peut être que due à une exposition professionnelle). Le tableau X et la figure 7 illustrent l’évolution de cette mortalité. tableau x : Evolution du nombre de décès par asbestose dans l’ensemble de la population française de 1968 à 1994 année 1968 1969 1970 1971 1972 1973 1974 1975 1976 1977 1978 1979 1980 1981 homme 2 1 0 3 1 0 5 3 2 4 8 9 7 9 femme 0 0 1 1 0 1 0 2 0 2 0 2 3 4 total 2 1 1 4 1 1 5 5 2 6 8 11 10 13 année 1982 1983 1984 1985 1986 1987 1988 1989 1990 1991 1992 1993 1994 homme 13 13 16 32 24 27 23 25 24 23 32 46 24 femme 2 3 3 1 4 4 2 4 2 3 6 4 1 total 15 16 19 33 28 31 25 29 26 26 38 50 25 Source : INSERM Code CIM8 n° 515.2 puis CIM9 n° 501 Les données concernant la mortalité par asbestose présentent, entre l’homme et la femme, des différences plus marquées que dans le cas de la mortalité par mésothéliome dans la mesure où, en moyenne, le "sexe ratio" H/F est égal à 6,8 (1,96 pour le mésothéliome). L’évolution de la mortalité est aussi plus rapide pour l’asbestose : rapport 4,2 entre la fin des années 1970 (1977-1979) et le début des années 1990 (1991-1994). Enfin, il faut noter que cette maladie, présentée comme une maladie professionnelle due aux conditions de travail d’un passé lointain, a entrainé en moyenne, au cours des 10 dernières années (1985-1994), le décès de 31 victimes par an. figure 7 : Evolution du nombre de décès par asbestose, en France
La figure 8 illustre le parallélisme entre l’évolution du nombre d’asbestoses "reconnues" dans le cadre du Régime Général et celle de la mortalité en France due à cette affection. Les données publiées par l’INSERM et la CNAM montrent donc qu’entre 1976 et 1994, il y a eu en France 1 décès par asbestose pour 7 asbestoses reconnues par les CRAM. Ce décès survient en moyenne 4 ans après la reconnaissance de la maladie professionnelle par les caisses primaires. figure 8 :Evolutions comparées de la mortalité par asbestose en France et du nombre d’asbestoses reconnues au titre du Régime Général de la Sécurité Sociale .
A la demande de la Direction des Relations du Travail (DRT) et de la Direction Générale de la Santé (DGS), l’INSERM a réuni un groupe dit "d’expertise collective" afin de faire un bilan des études épidémiologiques portant sur les atteintes de santé provoquées par les expositions passives et professionnelles aux poussières d’amiante. Mis en place en décembre 1995, ce groupe remettait, fin juin 1996, un premier rapport de synthèse (rapporteurs : Pr M. GOLDBERG et D. HEMON) auquel sera adjoint un volumineux rapport complémentaire. Nous présentons ci-après, une courte synthèse des points de ce rapport qui porte presque exclusivement sur le cancer du poumon et le mésothéliome pleural. Les autres localisations comme le larynx qui est souvent évoqué ou les cancers colo-rectaux, ceux de l’appareil digestif (oesophage, estomac, foie, pancréas) ou de l’appareil uro-génital (reins, vessie, ovaires) sont seulement citées car elles n’ont pas fait l’objet, selon le rapport INSERM, dans les diverses études analysées, d’une conclusion ferme ayant pu être établie quant à l’existence d’une relation de type causal. Les principales conclusions du rapport INSERM ð Toutes les fibres d’amiante sont cancérogènes : la mortalité par cancer du poumon est aussi élevée dans les populations exposées aux fibres chrysotile, mixtes ou aux seules amphibole ; la fixation de valeurs limites d’exposition distinctes, pour les fibres chrysotile et amphibole, ne reposait donc pas sur des données scientifiques ; cette distinction entre fibres chrysotile et amphibole risque de conduire à considérer que les fibres chrysotiles ne seraient pas cancérogènes. Notons que ces dernières remarques constituent une critique sévère pour les experts de l’Union Européenne qui ont distingué dans les Directives Européennes les fibres chrysotile des amphibole ; ð Le nombre global de décès attribuable à une exposition professionnelle à l’amiante, en France, en 1996, peut être estimé à 750 décès par mésothéliomes et 1200 décès par cancers du poumon, soit au total 1950 décès. Cette évaluation du nombre minimum de décès se fonde sur : une évaluation minimale de 650 décès par mésothéliome en 1993 ; une augmentation de + 25 % tous les 3 ans ; une fraction des cancers du poumon, toutes causes réunies, attribuables aux expositions professionnelles à l’amiante égale à 5,7 %. è Le cas des mésothéliomes : Ø Il existe une disparité considérable entre le faible nombre de mésothéliomes pris en charge par les différents systèmes de protection sociale et l’évaluation épidémiologique du nombre de cas de ces maladies induites par les expositions professionnelles à l’amiante. Cette pathologie reste insuffisamment prise en compte dans la pratique du corps médical, ce qui affecte gravement la reconnaissance de cette maladie professionnelle. Ø On admet habituellement que 10 à 30 % des mésothéliomes sont sans exposition connue à l’amiante, mais la méconnaissance ou l’oubli fréquent d’une exposition professionnelle ou non, qui peuvent être importants, font que ces expositions appelées "occultes" peuvent expliquer une partie des cas de mésothéliome sans exposition identifiée. Il est donc possible d’attribuer aux expositions professionnelles l’étiologie de la quasi-totalité des cas de mésothéliome dans les pays industrialisés. Ø Les mésothéliomes s’observent surtout actuellement dans les métiers qui impliquent des tâches d’intervention sur des matériaux comportant de l’amiante. Les professions les plus touchées sont les tôliers-chaudronniers (chantiers navals), les carrossiers industriels, les plombiers, les charpentiers, les électriciens. A eux seuls, les métiers du bâtiment contribuent actuellement au quart de tous les décès par mésothéliomes, proportion considérée comme probablement sous-estimée. Ø L’évaluation de la relation qui existe entre la probabilité de survenue d’un mésothéliome et le niveau d’exposition cumulée à l’amiante montre que le modèle linéaire sans seuil, bien qu’incertain, est le plus plausible. Ø L’exposition aux fibres d’amiante chrysotile présente un excès indiscutable de mortalité par mésothéliome, bien que les amphiboles soient plus toxiques pour cette pathologie. è Le cas des cancers du poumon : Ø Le modèle qui apparaît le plus approprié pour décrire les risques de mortalité par cancer du poumon, attribuables aux expositions à l’amiante, est un modèle : "linéaire sans seuil" en fonction de l’exposition cumulée, identique pour les différentes fibres, multiplicatif par rapport à la mortalité observable, dans la même population non exposée à l’amiante. Ø Il n’existe pas de critères cliniques ou anatomo-pathologiques qui permettent d’isoler, de façon certaine, un cancer du poumon provoqué par l’amiante. Ø L’exposition à l’amiante et la consommation de tabac ont un effet conjoint multiplicatif. Ø Les fibres longues et fines sont les plus cancérogènes pour le poumon. VI - LES MALADIES PROFESSIONNELLES PROVOQUEES PAR L’AMIANTE, EN ALLEMAGNE Les maladies professionnelles graves provoquées par l’amiante, telles que l’asbestose, le cancer du poumon ou le mésothéliome sont reconnues en plus grand nombre en Allemagne qu’en France. Le tableau XI et la figure 9 illustrent l’évolution du nombre d’affections professionnelles reconnues dans ce pays depuis 1980. Par Allemagne, on entend ici essentiellement l’ex RFA (62 millions d’habitants), la réunion avec la RDA (17 millions d’habitants) n’étant intervenue qu’en fin 1990. tableau xi :Les maladies professionnelles graves provoquées par l’amiante en Allemagne ASBESTOSES CANCERS DU POUMON MESOTHELIOMES TOTAL CANCERS TOTAL annee nbre de mp deces associes nbre de mp deces associes nbre de mp deces associes somme cancers deces associes nbre de mp deces associes 1980 118 20 20 18 36 27 56 45 174 65 1981 141 25 25 18 70 54 95 72 236 97 1982 139 25 30 21 59 46 89 67 228 92 1983 178 28 35 17 74 69 109 86 287 114 1984 167 32 39 43 119 98 158 141 325 173 1985 173 23 43 41 125 108 168 149 341 172 1986 192 31 38 36 168 152 206 188 398 219 1987 208 30 53 46 194 168 247 214 455 244 1988 260 30 104 87 222 175 326 262 586 292 1989 280 30 125 97 265 218 390 315 670 345 1990 379 30 132 101 291 212 423 313 802 343 1991 495 40 172 104 301 207 473 311 968 351 1992 646 35 221 137 334 248 555 385 1201 420 1993 1268 41 382 263 406 293 788 556 2056 597 Comme pour la France, c’est à partir de 1987 qu’on observe, en Allemagne, une augmentation significative du rythme des reconnaissances des affections cancéreuses. Depuis cette date, le nombre total des cancers reconnus en France est environ 5 à 6 fois, au moins, inférieur au nombre reconnu en Allemagne. Le déficit atteint un ordre de grandeur (facteur 10) pour les cancers du poumon ; il est moitié moindre (facteur 5) pour les mésothéliomes. Nous pouvons également noter qu’en dehors de ces écarts, les évolutions, au moins après 1987, de ces données (cancers du poumon, mésothéliomes, totalité des cancers) demeurent approximativement parallèles, c’est-à-dire avec un rythme d’augmentation comparable ; les chiffres doublent, ou plus triplent parfois en 5 à 6 ans. Quant aux asbestoses, si leur nombre est comparable en 1987, elles restent à peu près stables en France, alors qu’elles augmentent rapidement en Allemagne pour être multipliées par 7 en 1993. La comparaison du nombre de cancers reconnus pour les années 1987-93, en France (502 cas) et en Allemagne (3202 cas) montre qu’il y a 6,4 fois plus de cancers professionnels pris en charge en Allemagne qu’en France. Plus globalement, on constate que le nombre total des MP amiante reconnues en Allemagne, peu différent de celui reconnu en France en 1980, s’en écarte progressivement de plus en plus, d’un facteur atteignant 2 en 1990 et presque 4 en 1993 (avec le bond des asbestoses). figure 9 : Maladies professionnelles reconnues en Allemagne. Affections provoquées par l’amiante
VII - LES MALADIES PROFESSIONNELLES PROVOQUEES PAR L’AMIANTE EN BELGIQUE La Belgique, qui est un pays 5,7 fois moins peuplé que la France, reconnaît proportionnellement plus de maladies professionnelles provoquées par l’amiante. tableau xii :Les maladies professionnelles graves provoquées par l’amiante en Belgique années asbestoses cancers du poumon mésothéliomes décès 1984 203 3 10 - 1985 144 4 12 17 1986 163 4 27 19 1987 115 7 34 34 1988 124 4 24 28 1989 149 7 33 33 1990 122 7 25 38 1991 208 6 35 31 1992 269 6 43 56 1993 211 12 38 47 1994 203 3 50 79 Sources : Statistiques annuelles du "Fonds des Maladies Professionnelles" - Belgique
Pour les mésothéliomes, on relève, en Belgique, une vitesse d’augmentation comparable à ce qu’elle est en France et en Allemagne : doublement en 6 ans environ. Figure 10 -Maladies professionnelles reconnues en Belgique Affections provoquées par l’amiante
La comparaison des données cumulées sur les dix dernières statistiques annuelles connues (1984-1993) indiquées dans le tableau XIII, montre très clairement, eu égard au nombre d’habitants, les écarts entre pays sur le plan de la reconnaissance des MP. tableau xiii : Comparaison du nombre de MP reconnues en France, en Belgique et en Allemagne sur une période de 10 ans (1984-1993) affections professionnelles France Belgique Allemagne asbestoses 1 795 1 708 (0,95)* 4 068 (2,27)* cancers du poumon 114 60 (0,53) 1 309 (11,48) mésothéliomes 442 281 (0,64) 2 425 (5,49) décès 218 303 (1,39) 3 156 (14,48) *chiffres rapportés à ceux de la France sans tenir compte des différences de population Pour faciliter la comparaison entre les pays, on peut rapporter les chiffres des données, cumulées sur les derniers 10 ans, concernant chacun d’eux au nombre d’habitants (faute de mieux). Pour cela, on admet, en millions d’habitants, les populations suivantes : 10 pour la Belgique, 58 pour la France et 62 pour l’Allemagne (RFA seule). Les taux d’affections professionnelles par million d’habitants et pour une période de 10 ans, sont alors ceux du tableau XIV. tableau xiv :Comparaison des taux de MP reconnues en France, en Belgique et en Allemagne (valeurs pour une période cumulée de 10 ans) taux de mp par million d’habitants France Belgique Allemagne asbestoses 30,9 170,9 65,6 cancers du poumon 2 6,0 21,1 mésothéliomes 7,6 28,1 39,1 décès 3,8 30,3 50,9 Les écarts observés entre la France et l’Allemagne ou la Belgique sont préoccupants et il sera utile d’analyser tant les prochaines statistiques françaises que celles des pays européens comme l’Allemagne, le Royaume Uni et la Belgique, afin de voir notamment si ces différences sont principalement liées aux systèmes de reconnaissance des maladies professionnelles ou si elles sont dues à des atteintes professionnelles d’ampleurs inégales . VIII - LES RAISONS D’UNE PROBABLE AUGMENTATION A VENIR DU NOMBRE DES AFFECTIONS PROVOQUEES PAR L’AMIANTE EN FRANCE. Si l’on se réfère aux données statistiques nationales relatives à la reconnaissance des maladies professionnelles (tableau IIB), aussi bien qu’aux données disponibles en Allemagne et en Belgique, l’atteinte cancéreuse dominante observée chez les salariés exposés à l’amiante est le mésothéliome. Ce cancer très grave qui affecte la plèvre est presque exclusivement provoqué par l’amiante. La preuve, au cas par cas, d’un lien causal entre l’exposition à l’amiante et la survenue d’un mésothéliome n’est pas facile à apporter. La mesure du taux de corps asbestosiques présents en milieu pulmonaire permet, dans certains cas, d’apprécier le rôle joué par l’amiante dans la survenue du cancer. Ce n’est cependant pas toujours un indicateur fiable car il donne des "faux négatifs" et la négativité de l’examen ne prouve pas l’absence d’exposition. En effet, les fibres d’amiante les plus fines (la variété chrysotile notamment) sont éliminées au fil des ans des tissus pulmonaires soit par l’expectoration, soit par migration vers la plèvre, les ganglions ou le diaphragme, soit par dissolution. De la même façon, on ne trouve généralement pas de corps asbestosiques dans les tumeurs bronchopulmonaires provoquées par l’amiante. Ces corps se trouvent dans les tissus adjacents à la tumeur, mais seuls certains services hospitaliers ont le réflexe de faire ce type d’investigations qui permet d’identifier la cause de l’affection. On voit donc les difficultés rencontrées pour recenser correctement les différentes affections provoquées par l’amiante. Selon h. pezerat, Directeur de Recherche au CNRS, les affections cancéreuses mortelles provoquées par l’amiante peuvent s’évaluer, à partir des décès constatés dans la population pour le mésothéliome pleural, sur les bases suivantes : ð les décès par mésothéliomes péritonéaux sont 5 fois moins nombreux que ceux dus aux pleuraux (887 en 1994 soit 887 x 0,2 = 177) ; ð les décès par cancer broncho-pulmonaire sont 1,5 à 2 fois plus nombreux que ceux relatifs aux cancers de la plèvre (887 x 1,5 à 2 = 1320 à 1770). Si l’on admet la validité de ces relations, il est possible de calculer l’ensemble des atteintes cancéreuses. Sachant qu’en 1994, il a été recensé en France 887 décès par mésothéliome pleural, on obtient ainsi un nombre total de décès par cancer compris entre environ 2390 et 2840. Ce chiffre est compatible avec l’estimation récente du groupe d’expertise INSERM qui évalue le nombre de décès comme étant égal au minimum à 1950 en 1996. Les décès par cancers d’origine professionnelle provoqués par l’amiante représentent donc 1,7 % à 2,2 % de l’ensemble des cancers recensés en France(144 746 en 1994). Ils représentent au minimum 1,4 % selon l’estimation du groupe d’expertise INSERM. Les chiffres de décès par mésothéliomes, pour l’Angleterre et le Pays de Galles (51 millions de personnes) conduisent à un nombre total de décès qui est comparable aux évaluations faites pour la France. Les données relatives à l’incidence du mésothéliome en fonction de l’âge ont permis à l’épidémiologiste anglais j. peto de considérer que l’on était au début d’une quasi-épidémie de cancers dus à l’amiante. Il prédit, pour les 25 années à venir, 50 000 décès par mésothéliomes et 100 000 autres cancers pour la seule Grande Bretagne (soit, en moyenne, 6000 cancers mortels par an). h. pezerat, en comparant les incidences en fonction de l’âge pour la France et la Grande-Bretagne, pense qu’une prédiction de même type peut être faite pour la France, d’autant plus que l’Angleterre a interdit assez rapidement l’usage des variétés d’amiante les plus cancérogènes, (le crocidolite en 1972 et l’amosite en 1980) alors qu’il a fallu attendre, en France, le décret du 26 juillet 1994 pour obtenir ces interdictions. La France se trouverait donc également au début d’une épidémie qui devrait culminer vers 2020. IX - CONCLUSIONS. ð La sous-évaluation des atteintes professionnelles Ø En matière de reconnaissance des maladies professionnelles provoquées par l’amiante, les dernières statistiques publiées par la CNAM en 1997, indiquent que 109 mésothéliomes ont été reconnus en 1995, 84 en 1994 et 77 en 1993. Par ailleurs, les données de la mortalité nationale, regroupées par l’INSERM, montrent que les cancers de la plèvre font maintenant, dans l’ensemble de la population française, de l’ordre de 900 victimes par an de 1992 à 1994, dont environ 80% sont, selon l’INSERM, attribuables de façon certaine à l’amiante. La confrontation de ces données chiffrées montre bien que la fraction des victimes reconnues est dérisoire (environ 7% en 1992-1994). La figure 11, illustre bien l’écart qui sépare les décès recensés du nombre de victimes reconnues par l’ensemble des CRAM. Figure 11 -Evolution comparée du nombre de décès par mésothéliome en France avec le nombre de mésothéliomes reconnus comme maladies professionnelles
Même si tous les décès ne sont pas attribuables aux seuls salariés du Régime Général de la Sécurité Sociale et concernent également des artisans, des salariés des Régimes Agricole, Minier, etc., la sous-évaluation du nombre de victimes dans ce Régime Général reste patente et illustre bien l’énorme effort qu’il faut accomplir en matière de reconnaissance des maladies professionnelles. Ø Concernant les victimes atteintes de cancer broncho-pulmonaire, le décalage entre l’estimation des décès réels (environ 1,5 à 2 fois le nombre de décès par mésothéliomes, soit de l’ordre de 1500 cas par an) et le nombre de MP reconnues (37 par an en 1992-1995) est encore plus illustratif des dysfonctionnements graves, en cette matière, de notre système de reconnaissance des maladies professionnelles. Le risque de cancers broncho-pulmonaires provoqués par l’amiante serait sous-estimé d’un facteur supérieur à 40. Ø Parmi les plus grandes difficultés rencontrées par les victimes atteintes d’un mésothéliome ou d’un cancer broncho-pulmonaire provoqués par l’amiante, figure notamment l’exigence d’apporter la preuve de leur exposition au risque d’inhalation de ces fibres minérales. Ce handicap est évidemment encore amplifié pour les ayants-droit lorsque la victime est physiquement diminuée ou décédée. ð La surveillance post-professionnelle Ø Les délais de latence importants qui affectent le cancer broncho-pulmonaire et le mésothéliome provoqués par les fibres d’amiante militent pour une surveillance post-professionnelle, des travailleurs exposés. Deux ans après la publication du décret n° 93-644 du 26 mars 1993 concernant la surveillance post-professionnelle des personnes ayant été exposées, au cours de leur activité salariée, à des agents cancérogènes, l’arrêté du 28 février 1995 (JO du 22/03/95) fixe le modèle type d’attestation d’exposition et les modalités d’examens médicaux (nature et fréquence) adaptés à chaque type d’atteinte. Il s’agit là d’une première mais timide avancée dans la mesure où il n’est proposé, par exemple pour l’amiante, qu’une radiographie du thorax tous les deux ans, éventuellement complétée par une exploration fonctionnelle respiratoire. Il serait néanmoins très utile que les CHSCT se préoccupent activement de la délivrance, encore bien trop rare, de ces types d’attestation d’exposition qui constituent, pour les ex-salariés exposés, une aide en matière de suivi médical préventif et pour la constitution du dossier administratif si une maladie professionnelle survenait. ð L’évolution de la réglementation Ø En matière de protection des jeunes travailleurs (moins de 18 ans), le législateur a été bien timide avec la loi du 11 juillet 1975 (article R 234-40 du Code du travail) en interdisant seulement leur affectation à des travaux de cardage, de filature ou de tissage de l’amiante. Ceci est d’autant plus préoccupant que l’on observe pour l’amiante, comme pour bien d’autres cancérogènes, une incidence plus grande des affections pour les personnes exposées précocement avant l’âge adulte. Ø Les progrès techniques réalisés en matière de recherche des substituts de l’amiante tels que ceux utilisables dans les garnitures de freins ou les fibrociments, aurait dû permettre un bannissement plus précoce de l’amiante en France, qui n’aurait pas affecté l’emploi des salariés concernés et aurait permis un gain significatif en matière de santé au travail. Il y a certes eu, en 1994, le bannissement réglementaire de l’usage des amphiboles (décret n°94-645 du 26 juillet 1994), mais il ne concernait en pratique que quelques pour-cent du tonnage de l’amiante mis en oeuvre en France comme en Europe. La Convention 162 du Bureau International du Travail demandait d’ailleurs, dès le 24 juin 1986 (article 11.1) l’interdiction de l’usage de la crocidolite et des produits en renfermant. Ø La décision gouvernementale, prise le 3 juillet 1996 par le Ministre des Affaires Sociales, visant à interdire toute mise en oeuvre de l’amiante, à compter du 1er janvier 1997, a entraîné un certain nombre de dérogations concernant notamment l’usage de matériels soumis à homologation. Dans l’attente de l’autorisation officielle d’usage des substituts par les autorités compétentes, des dérogations d’un an, éventuellement renouvelables, ont été délivrées par le Ministère du Travail aux industriels concernés. Ceci ne devrait cependant entraîner l’utilisation que de quelques pour-cent du tonnage annuel d’amiante mis en oeuvre au cours des dernières années (environ 35 000 t/a de 1992 à 1994). Ø Le 22 mai 1996, le tableau 30 relatif aux affections professionnelles provoquées par l’amiante est profondément modifié. Les nouveaux tableaux 30 et 30 bis devraient permettre une meilleure prise en charge des victimes d’affections bénignes et malignes provoquées par l’amiante. La définition des affections figurant dans l’ancienne version du tableau 30 avait, deux ans auparavant, été reconnue par le Conseil d’Etat comme étant entachée d’illégalité (car elle faisait obstacle au principe de la "présomption d’origine" qui fonde le système français de reconnaissance des maladies professionnelles). Cette contestation juridique a coïncidé avec les débuts d’une large interpellation médiatique qui montrait l’émergence de l’ampleur des dégâts provoqués par l’amiante en France, mais également au Royaume-Uni, en Allemagne et en Belgique notamment. ð L’échec de la gestion du risque Ø Le discours sur la "maîtrise des risques", développé en France par les industriels de l’amiante, qui se fondait sur une amélioration de la prévention dans les industries de l’amiante, s’est avéré, en pratique, particulièrement dangereux. Si certaines activités industrielles ont peut être été mieux maîtrisées, les centaines de milliers de salariés qui intervenaient dans le bâtiment pour percer, boucher, poncer, découper ou pour passer des câbles, ont été exposés de manière incontrôlée et totalement insoupçonnée. La reconstitution d’opérations élémentaires montre que, pendant des temps courts, on obtient des valeurs moyennes d’exposition qui peuvent dépasser d’un facteur 50 à 100 les concentrations réglementaires le plus sévères fixées en Europe, et en France en particulier. ð Les atteintes professionnelles en Europe Ø La comparaison du nombre global d’atteintes professionnelles, consécutives à une exposition à l’amiante, montre au moins pour l’Allemagne et la Belgique, que ces pays reconnaissent un nombre de maladies professionnelles significativement plus grand que celui de la France. Il est important de voir si ces différences observées entre pays sont imputables aux modalités de reconnaissance des maladies professionnelles dans les pays concernés ou à des écarts importants dus à l’inégalité des expositions professionnelles. Il faudrait, de plus, compléter la comparaison en prenant, en plus du nombre de victimes "reconnues", les modalités de la reconnaissance telles que les indemnités versées, la durée de la protection, limitée ou à vie, le niveau des rentes, les possibilités de réversion de la rente au conjoint en cas de décès, etc... ð Etudes épidémiologiques des affections provoquées par l’amiante Le rapport des experts de l’INSERM, qui a pris en compte près de 1200 publications, a montré que, pour l’essentiel, les études publiées se focalisent sur l’atteinte du système respiratoire. Or, l’inhalation de poussières s’accompagne d’un piégeage, au niveau de la trachée et des bronches, qui est fonction de la géométrie des particules. Ces poussières sont alors reconduites au niveau du carrefour aérodigestif et sont incorporées dans l’organisme par voie digestive. Des travaux devraient être conduits pour bien quantifier la fraction ainsi ingérée dans le cas des fibres d’amiante. Les mésothéliomes du péritoine et du péricarde prouvent bien que les fibres inhalées ne sont pas toutes piégées par le seul système respiratoire. Certaines d’entre elles passent par voie digestive tandis que d’autres, probablement les plus petites, sont véhiculées par le sang circulant et la lymphe. Ces petites fibres atteignent ainsi divers tissus et organes avant d’être éliminées (vessie). Si les fibres les plus longues se sont avérées dangereuses du fait qu’elles favorisent l’induction de cancers du poumon, les atteintes des petites fibres (que l’on trouve dans la plèvre notamment) sont encore insuffisamment caractérisées. CHRONOLOGIE DES TEXTES RÉGLEMENTAIRES SUR L’AMIANTE Ordonnance n°1724 du 2 août 1945 (JO du 03/08/45 et rectificatif JO du 18/08/45) Création d’un tableau de maladies professionnelles (n°25) relatif à l’inhalation de "poussières siliceuses et amiantifères". L’affection prise en compte est la fibrose lorsqu’il y a des signes radiologiques accompagnés de troubles fonctionnels (dyspnée en particulier). Décret n°50-1082 du 31 août 1950 (JO du 02/09/50) Modification du tableau 25 et création d’un tableau spécifique de l’amiante portant le n°30. En plus des signes radiologiques et des troubles fonctionnels, il est exigé la présence de "corpuscules asbestosiques" dans l’expectoration. Les complications cardio-vasculaires et pulmonaires de l’asbestose sont prises en compte. Décret n°51-1215 du 3 octobre 1951 (JO du 21/10/51) Modification du tableau 30 : l’asbestose est reconnue lorsqu’il y a des signes radiographiques, accompagnés de troubles (dyspnée et toux) confirmés par des épreuves fonctionnelles respiratoires et la présence de corpuscules asbestosiques dans l’expectoration ; les complications cardiaques sont précisées (hyposystolie et asystolie, par insuffisance ventriculaire droite), mais les complications pulmonaires ne sont plus prises en compte. Décret n°57-1176 du 17 octobre 1957 (JO du 23/10/57 et rectificatif JO du 01/11/57) Modifiant les modalités d’application du Livre IV du Code de la Sécurité Sociale relatives aux affections provoquées notamment par les poussières d’amiante. Loi 75-625 du 11 juillet 1975 Il est interdit d’occuper des jeunes travailleurs de moins de 18 ans aux travaux de cardage, filature et tissage de l’amiante et de les admettre de manière habituelle dans les locaux affectés à ces travaux (Art. R234-20 du Code du Travail). Décret n°76-34 du 5 janvier 1976 (JO du 15/01/76) Modification importante du tableau 30 qui prend en compte le cancer broncho-pulmonaire considéré comme une complication de l’asbestose et le mésothéliome primitif pleural, péricardique ou péritonéal. Circulaire n°47SS du 14 janvier 1977 Relative à l’application du décret 76-1095 du 25 novembre 1976 (modifiant le décret 57-1176 du 17 octobre 1957). Elle porte sur la procédure d’examen des victimes d’une maladie professionnelle (par le collège des trois médecins ou par le médecin agréé en matière de pneumoconioses) et sur leurs droits aux soins. Arrêté du 29 juin 1977 Interdisant le flocage dans les locaux d’habitation. Arrêté du 11 juillet 1977 (JO du 27/07/77) Sur la surveillance médicale spéciale des travailleurs exposés aux poussières d’amiante. Décret n°77-949 du 17 août 1977 (JO du 20/08/77) Relatif aux mesures particulières d’hygiène applicables dans les établissements où le personnel est exposé à l’action des poussières d’amiante. La concentration moyenne en fibres d’amiante ne doit pas dépasser 2 fibres par cm 3 . Arrêté du 25 août 1977 (JO du 18/09/77) Relatif au contrôle de l’empoussièrement dans les établissements où le personnel est exposé à l’action des poussières d’amiante (agrément des organismes chargés du contrôle, méthodes de prélèvement et numération des fibres d’amiante). Arrêté du 17 octobre 1977 (JO du 01/11/77) Relatif au transport de l’amiante (consigne de sécurité pour ce type de transport). Décret n° 78 du 20 mars 1978 (JO du 23/03/78) Relatif à l’emploi des fibres d’amiante pour le flocage des bâtiments (interdisant l’emploi de produits contenant plus de 1% d’amiante). Arrêté du 24 octobre 1978 (JO du 11/11/78) Portant sur les premiers agréments d’organismes pour les prélèvements et comptages de poussières d’amiante. Arrêté du 8 mars 1979 (JO du 21/03/79) Fixant les instructions techniques que doivent respecter les médecins du travail assurant la surveillance médicale des salariés exposés à l’inhalation des poussières d’amiante. Circulaire du Ministère de la Santé et de la Sécurité Sociale du 10 février 1981 Relative à la surveillance médicale des travailleurs exposés à l’amiante. Cette circulaire proposait un suivi post-professionnel en application du décret 57-1176 du 17 octobre 1957. Circulaire DGR n°1182-81 du 26 août 1981 Relative à la surveillance médicale post-professionnelle et la prise en charge des maladies professionnelles des travailleurs exposés à l’action des poussières d’amiante. Arrêté du 19 février 1985 (JO du 22/02/85) Fixant la liste des travaux pour lesquels il ne peut être fait appel aux salariés des entreprises de travail temporaire (travaux de déflocage et démolition exposant aux poussières d’amiante). Décret n°85-630 du 19 juin 1985 (JO du 23/06/85) Modification du tableau 30 : le délai de prise en charge des affections bénignes passe de 5 à 10 ans, et celui du mésothéliome de 5 à 15 ans ; le mésothéliome et le cancer du poumon sont reconnus "quand la relation avec l’amiante est médicalement caractérisée". Décret n°87-232 du 27 mars 1987 (JO du 2/04/87) Modifiant le décret 77-949 du 17 août 1977. La concentration moyenne en fibres d’amiante passe de 2 à 1 fibre/cm 3 pour les variétés autres que la crocidolite, à 0,8 pour les mélanges et à 0,5 fibre/cm 3 pour la crocidolite. Décret n°88-466 du 28 avril 1988 (JO du 30/04/87) Relatif à l’étiquetage des produits contenant de l’amiante. Circulaire DRT n°88-15 du 8 août 1988 Relative au décret 87-232 du 27 mars 1987. Elle comporte notamment des recommandations concernant le contrôle atmosphérique des fibres d’amiante. Arrêté du 8 octobre 1990 abrogeant et remplaçant l’arrêté du 19 février 1985 (JO du 9/11/90) Interdisant aux travailleurs salariés des entreprises de travail temporaire et aux salariés sous contrat à durée déterminée les travaux de déflocage et de démolition exposant aux poussières d’amiante. Décret n°92-634 du 6 juillet 1992 (JO du 10/07/92) Modifiant le décret 77-949 du 17 août 1977 (modifié) relatif aux mesures particulières d’hygiène applicables dans les établissements où le personnel est exposé à l’action des poussières d’amiante. Arrêté du 8 mars 1993 (JO du 18/03/93) Modifiant et complétant l’arrêté du 25 août 1977 (modifié) relatif au contrôle de l’empoussièrement dans les établissements où le personnel est exposé à l’action des poussières d’amiante. Décision du Conseil d’Etat du 10 juin 1994 (séance du 27/05/94) Le Conseil d’Etat, statuant au contentieux, suite à la requête d’un ayant-droit d’une victime décédée d’un cancer broncho-pulmonaire, dit que le tableau 30 est entaché d’illégalité car il mentionne les cancers broncho-pulmonaires primitifs uniquement lorsque "la relation avec l’amiante est médicalement caractérisée". Décret n°94-645 du 26 juillet 1994 (JO du 28/07/94) Modifiant le décret 88-466 du 28 avril 1988 relatif aux produits contenant de l’amiante. Il s’agit d’un décret relatif au bannissement des amphiboles (actinolite, amosite, anthophyllite, crocidolite et trémolite) en France. Circulaire DGS/VS3/94/n°70 du 15 septembre 1994 Relative aux procédures et règles de travail à mettre en oeuvre pour procéder au déflocage, au retrait et à l’élimination de l’amiante ou de matériaux friables contenant de l’amiante dans des bâtiments, sur des structures ou des installations. Arrêté du 28 février 1995 (JO du 22/03/95) Fixant le modèle type d’attestation d’exposition et les modalités d’examen dans le cadre du suivi post-professionnel des salariés ayant été exposés à des agents ou procédés cancérogènes. Décret n°96-97 du 7 février 1996 (JO du 8/02/96) Relatif à la protection de la population contre les risques sanitaires liés à une exposition à l’amiante dans les immeubles bâtis. Il fixe des dates limites pour la mise en oeuvre pour la recherche de l’amiante en place, le contrôle de l’état de conservation de ce matériau au moyen d’une "grille d’évaluation", la mesure des niveaux d’empoussièrement. Arrêté du 7 février 1996 (JO du 8/02/96) Relatif aux conditions d’agrément d’organismes habilités à procéder aux contrôles de la concentration en poussières d’amiante dans l’atmosphère des immeubles bâtis. Arrêté du 7 février 1996 (JO du 8/02/96) Relatif aux modalités d’évaluation de l’état de conservation des flocages et calorifugeages contenant de l’amiante et aux mesures d’empoussièrement dans les immeubles bâtis. Décret n°96-98 du 7 février 1996 (JO du 8/02/96) Relatif à la protection des travailleurs contre les risques liés à l’inhalation de poussières d’amiante. Il abroge le décret 77-949 du 17 août 1977. Il considère trois catégories d’activité exposant des travailleurs à l’amiante : la fabrication et la transformation de matériaux amiantés, les activités de confinement et de retrait de l’amiante, les activités susceptibles de libérer des fibres d’amiante. Arrêté du 4 avril 1996 (Bulletin Officiel du 5/05/96) Modifie l’arrêté du 8 octobre 1990 qui fixe la liste des travaux pour lesquels il ne peut être fait appel aux salariés sous contrat à durée déterminée (activités de fabrication ou de transformation de matériaux contenant de l’amiante, opérations d’entretien ou de maintenance sur des flocages ou calorifugeages contenant de l’amiante, activités de confinement, de retrait de l’amiante ou de démolition exposant aux poussières d’amiante). Circulaire DGS/VS3/DRT/CT4/DHC/ TE1/DPPR/BGTD n°290 du 26 avril 1996 (Bulletin Officiel Travail, Affaires Sociales, n°96/20 pp. 109-132) Relative à la protection de la population contre les risques sanitaires liés à une exposition à l’amiante dans les immeubles bâtis. Cette circulaire explicite la nouvelle réglementation. Arrêté du 14 mai 1996 (JO du 23/05/96) Relatif aux modalités de contrôle de l’empoussièrement dans les établissements dont les travailleurs sont exposés à l’inhalation des poussières d’amiante. Ce texte porte sur les modalités de prélèvement, les méthodes et les moyens à mettre en oeuvre pour mesurer la concentration en fibres d’amiante dans l’air inhalé par les travailleurs. Arrêté du 14 mai 1996 (JO du 23/05/96) Relatif aux règles techniques que doivent respecter les entreprises effectuant des activités de confinement et de retrait de l’amiante. Elles concernent les protections collectives et individuelles, la décontamination des travailleurs et les modalités de confinement du chantier. Décret n°96-445 du 22 mai 1996 (JO du 25/05/96) Le tableau 30 est à nouveau modifié suite à la décision du Conseil d’Etat du 10 juin 1994 : Le mésothéliome est reconnu sans réserve particulière. Le cancer broncho-pulmonaire primitif est reconnu comme dégénérescence maligne d’une asbestose ou d’une lésion pleurale. Un tableau 30 bis à liste limitative est créé pour le cancer broncho-pulmonaire primitif qui se déclare en l’absence d’atteinte bénigne due à l’amiante. Décret n°96-446 du 22 mai 1996 (JO du 25/05/96) Relatif aux maladies professionnelles et modifiant le code de la Sécurité Sociale. Le Code de la Sécurité Sociale prévoit des dispositions spéciales sur les affections professionnelles provoquées par les poussières de silice (tableau 25), d’amiante (tableau 30) et d’oxyde de fer (tableau 44). Ce décret prévoit l’extension de certaines dispositions aux tableaux récemment créés relatifs à des affections provoquées par ces trois toxiques (tableaux 30bis, 44bis, 91 et 94). Le tableau 30 bis, relatif au cancer broncho-pulmonaire, a introduit (par décret en Conseil d’Etat) un délai d’exposition de 10 ans. C’est un décret simple qui avait fixé à 5 ans le délai d’exposition pour toutes les affections provoquées par l’amiante. Ce décret en Conseil d’état vient confirmer ce délai de 5 ans pour toutes les maladies professionnelles du tableau 30. Loi n°96-452 du 28 mai 1996 article n°39 (JO du 29/05/96) Cette loi autorise l’Inspection du Travail à prendre toutes mesures, y compris l’arrêt temporaire du chantier en cas d’absence de dispositif de protection dans le cadre des opérations de confinement et de retrait de l’amiante (article L231-12 du Code du Travail). Arrêté du 28 mai 1996 (JO du 05/05/96) Cet arrêté donne la liste des organismes habilités à procéder aux contrôles de la concentration en poussières d’amiante dans l’atmosphère des immeubles (prélèvement et comptage des poussières). Circulaire DH/S13/96/1426 du 4 juin 1996 (Bulletin Officiel du Ministère des Affaires Sociales n° 96-28 du 8 août 96) Relative au recensement de la présence d’amiante dans les établissements publics et privés de santé et les établissements sociaux et médicaux-sociaux. 3 juillet 1996 Jacques BARROT, Ministre du Travail et des Affaires Sociales et Hervé GAYMARD, Secrétaire d’Etat à la Santé et à la Sécurité Sociale, annoncent que : "la fabrication, l’importation et la mise en vente des produits contenant de l’amiante, et notamment l’amiante-ciment, seront interdites à compter du 1er janvier 1997". La France devient, ainsi, le huitième pays d’Europe à bannir cette fibre minérale cancérogène après l’Allemagne, l’Italie, le Danemark, la Suède, les Pays-Bas, la Norvège et la Suisse. Arrêté du 4 juillet 1996 (JO du 12/07/96) Il applique aux travailleurs agricoles les dispositions de l’arrêté du 4 avril 1996 (travailleurs temporaires et CDD). Arrêté du 12 juillet 1996 (JO du 14/07/96 ) Relatif à la création d’une Commission Interministérielle pour la prévention et la protection contre les risques liés à l’amiante. Décret n°96-668 du 26 juillet 1996 (JO du 27/07/96) Le décret modifie le décret 88-466 du 28 avril relatif aux produits contenant de l’amiante. La liste des produits interdits est complétée. Elle concerne les articles à usage domestique (grille-pain, table à repasser, etc...), les panneaux isolants à usage professionnel et les matériaux destinés au calorifugeage de divers équipements. Circulaire DSS/4B/96/507 du 9 août 1996 Cette circulaire ministérielle est relative à l’instruction des dossiers de maladies professionnelles portant sur des affections répertoriées dans les tableaux 25, 30, 30bis, 44, 44bis, 91 et 94. Arrêté du 20 août 1996 (JO du 10/09/96) Concernant le contrôle qualité auquel doivent satisfaire les organismes sollicitant l’agrément pour le contrôle de certains risques chimiques prévus à l’article R231-55 du Code du Travail. Les organismes qui sollicitent un agrément pour le contrôle des atmosphères de travail, dans les établissements où des travailleurs sont exposés à l’inhalation de fibres d’amiante, sont concernés par le contrôle de qualité. Avis aux organisations professionnelles d’employeurs et de salariés (JO du 27/09/96) Suite aux orientations du Gouvernement, le Ministère du Travail annonce qu’il est en train de rédiger un décret relatif à l’interdiction de l’amiante. Ce document pouvait être consulté dans les trois semaines qui suivaient la publication de l’avis. Circulaire du 16 octobre 1996 (JO du 18/10/96) Relative au programme d’aide financière de l’état aux collectivités locales pour l’enlèvement, l’encoffrement et la fixation dans les établissements scolaires des flocages et calorifugeages contenant de l’amiante. Arrêté du 6 décembre 1996 portant application de l’article 16 du décret 96-98 du 7 février 1996 (JO du 1/01/97) Cet arrêté précise le contenu de l’attestation d’exposition à l’inhalation de poussières d’amiante remise par l’employeur à tout salarié à son départ de l’Etablissement. Arrêté du 13 décembre 1996 portant application des articles 13 et 32 du décret 96-98 du 7 février 1996 (JO du 01/01/97) Cet arrêté définit les recommandations et les instructions détaillées adressées aux médecins du travail pour effectuer le suivi des salariés soumis à l’inhalation de fibres d’amiante : Il étend les modalités de la surveillance post-professionnelle des salariés exposés à des cancérogènes, aux salariés toujours en activité (dans la même entreprise ou dans une autre), mais qui ne sont plus exposés. Il limite également à 2 h30 consécutives le port des équipements de protection individuelle. Il rappelle que le développement de l’épidémiologie en milieu de travail est une réelle nécessité. Décret n°96-1132 du 24 décembre 1996 (JO du 26/12/96) Ce décret modifie le décret du 7 février 1996 relatif à la protection des travailleurs. Décret n°96-1133 du 24 décembre 1996 (JO du 26/12/96) Ce décret pris en application du Code du Travail et du Code de la Consommation, précise le domaine de l’interdiction de l’amiante et pose le principe et les modalités relatifs à l’obtention des dérogations ainsi que les pénalités concernant les contrevenants. Arrêté du 24 décembre 1996 (JO du 26/12/96) Ce texte présente le formulaire de déclaration à remplir pour toute demande de dérogation à l’interdiction d’usage de l’amiante. Arrêté du 24 décembre 1996 relatif aux exceptions à l’interdiction de l’amiante (JO du 26/12/96) Ce deuxième arrêté définit les catégories d’exception à l’interdiction de l’amiante (la production de chlore et d’oxygène, les éléments de friction pour les avions et divers engins ou installations, certains joints d’étanchéité et des dispositifs d’isolation thermiques à plus de 600 °C). Circulaire n° 97-15 du 9 janvier 1996 relative à l’élimination des déchets d’amiante-ciment (publiée au BO du 10/03/97) Cette circulaire vise les déchets d’amiante-ciment produits lors des travaux de réhabilitation et de démolition du BTP (lesquels pourraient atteindre 400 000t/), et les produits amiante-ciment retirés de la vente. Elle vise à mettre en oeuvre à la fois la prévention contre l’inhalation de fibres mais également leur ingestion par transfert vers les eaux souterraines. Elle comporte 4 annexes qui visent : la classification des déchets. l’évacuation, le conditionnement et le transport. l’élimination et le stockage des déchets. le bordereau de suivi des déchets (traçabilité) Arrêté du 14 mai 1997 (JO du 23/05//97) Modifiant l’arrêté du 14 mai 1996 relatif aux règles techniques que doivent respecter les entreprises effectuant des activités de confinement et de retrait de l’amiante. Pour réaliser des travaux de confinement ou de retrait d’amiante friable, les entreprises doivent détenir un certificat délivré par un organisme certifiant leur qualification. Cet organisme doit lui-même être accrédité par le Comité Français d’Accréditation (COFRAC) ou par un organisme d’Accréditation européen. Arrêté du 7 aôut 1997 (JO du 17/08/97) Relatif aux limitations de mise sur le marché et d’emploi de certains produits contenant des substances dangereuses (transcription de la directive 94/60/CE du 20/12/94). Dans la liste des substances cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction, figurant en annexe de cet arrêté, pour lesquelles la mise sur le marché et l’importation à destination du public sont interdites, figurent 6 variétés d’amiante (avec leur numéro CAS). Décret 97-855 du 12 septembre 1997 modifiant le décret 96-97 du 07 février 1996 (JO du 19/09/97) Relatif à la protection de la population contre les risques sanitaires liés à une exposition à l’amiante dans les immeubles bâtis. Ce décret élargit aux faux plafonds la recherche de la présence d’amiante qui était précédemment limitée aux flocages et aux calorifugeages. Décret 97-1219 du 26 décembre 1997 modifiant le décret n° 96/98 du 7 février 1996 (JO du 26/12/97). Cette modification de l’article 26 du décret de 1996 porte sur les modalités de qualification requises pour les entreprises qui réalisent des travaux de confinement ou de retrait d’amiante friable (flocages, calorifugeages, etc...). Arrêté du 26 décembre 1997 modifiant l’arrêté du 14 mai 1996 (JO du 28/12/97. Relatif aux règles techniques que doivent respecter les entreprises qui réalisent des travaux de confinement ou de retrait d’amiante friable. Ces dernières doivent fournir un certificat attestant de leurs capacités dans ce domaine, certificat attribué sur la base d’un référentiel technique. L’organisme certificateur doit lui-même être accrédité par le Comité Français d’Accréditation (COFRAC). Arrêté du 26 décembre 1997 (JO du 28/12/97). Ce deuxième arrêté porte sur l’homologation de référentiels servant de base à la délivrance du certificat de qualification des entreprises chargées du retrait et du confinement de l’amiante friable. |