Le Président

 

Monsieur Lionel JOSPIN

Premier Ministre

Hôtel Matignon

57, rue de Varenne

75700 Paris

 

 

 

Vincennes, le 25 juillet 2000

 

 

Monsieur le Premier Ministre,

 

Nous sommes stupéfaits d’apprendre que le Fonds de garantie vient à nouveau d’engager une procédure auprès de la Cour d’Appel de Caen visant à faire suspendre l’exécution provisoire d’un jugement de la CIVI de Cherbourg du 3 juillet dernier concernant l’indemnisation de quatre victimes de l’amiante. Nous considérons qu’il s’agit cette fois d’une véritable déclaration de guerre contre les victimes.

En effet, non seulement cette décision feint d’ignorer celle rendue ce mois-ci par cette même Cour d’appel de Caen et qui considère que les jugements des CIVI sont exécutoires de droit mais, de plus, elle est en totale contradiction avec les assurances qui nous ont été données par le ministère de la Justice. D’autant que les décisions de Justice confirment les décision d’exécution provisoire. La dernière en date est celle de la Cour d’Appel d’Amiens qui, par un arrêt du 21 juillet dernier a rejeté la demande du Fonds de Garantie qui souhaitait voir suspendre le paiement d’une provision de 200 Mille Francs accordée par la CIVI d’Abbeville (Affaire Aulin c/ Fonds de Garantie).

Les victimes de l’amiante ne peuvent plus supporter un tel mépris à l’égard des souffrances qu’elles doivent endurer. Elles ne tolèrent plus cet acharnement procédurier de la part du Fonds de garantie qui, à l’évidence, a décidé de multiplier les manœuvres dilatoires pour retarder ou empêcher leur indemnisation.

 

 

…/…

 

Les victimes de l’amiante ne peuvent plus admettre non plus l’attitude du gouvernement, puisque les représentants des différents ministères sont majoritaires au sein du Conseil d’administration du Fonds de garantie.

Nous avons attiré votre attention sur la gravité de la situation et sur la politique inadmissible du FGTI. Au ministère de la Justice, on nous a assuré qu’une réunion interministérielle à Matignon devait déboucher sur une position des représentants des pouvoirs publics - au CA du 13 juillet consacré à l’amiante - cohérente avec la volonté du gouvernement. Sauf à considérer que la Direction du Fonds se moque des orientations de son Conseil d’administration, cette nouvelle procédure en défense à exécution provisoire tend à prouver que le gouvernement cautionne cette politique suivie jusqu’à ce jour par le FGTI. Nous espérons qu’il s’agit là d’une erreur.

Nous vous redemandons avec insistance de bien vouloir intervenir, le plus rapidement possible, auprès du Fonds de garantie, afin qu’il suspende toutes ses procédures visant à entraver l’indemnisation des victimes de l’amiante et qu’il engage les actions récursoires auprès des auteurs des infractions pénales.

Les victimes de l’amiante attendent un signal fort de ce gouvernement. Nous réitérons auprès de vous notre demande d’une amélioration notable du système de réparation des accidents du travail et des maladies professionnelles et vous rappelons l’urgence d’une loi d’indemnisation des victimes de l’amiante qui permette la réparation intégrale des préjudices subis par l’ensemble des victimes.

Nous sommes toujours à votre disposition pour vous rencontrer et vous exposer les difficultés auxquelles sont confrontées les victimes d’une catastrophe sanitaire sans précédent mais qui était évitable.

Dans cette attente, nous vous prions de bien vouloir agréer, Monsieur le Premier ministre, l’expression de notre considération.

 

 

François DESRIAUX

 

 

 

 

 

C.C. : Mesdames Martine AUBRY et Elisabeth GUIGOU