A la suite de l’article publié par le journal Le Monde, ce jour, l’Andeva s’est procuré le relevé de conclusions provisoires de la Cour des Comptes (1) sur la gestion du risque amiante par la branche Accidents du travail/Maladies professionnelles de la Sécurité sociale et ses institutions prévention (Direction des risques professionnels de la Cnam-TS, INRS, Cram, CPAM).
Même s’il ne s’agit pas d’un rapport définitif, son contenu et les questions posées par les magistrats de la Cour des Comptes démontrent déjà - et une fois de plus - que ces organismes chargés de la prévention des risques professionnels et de la réparation de leurs conséquences ont failli à leurs missions.
Comme l’ont déjà souligné d’autres rapports (rapport de l’Inserm en 1996, rapport de l’office parlementaire des choix scientifiques et technologique d’octobre 1997, rapport du Pr. Claude Got en 1998), les dangers mortels de l’exposition à l’amiante étaient connus depuis le début du siècle, le risque cancérogène était bien identifié depuis le milieu des années 60 et malgré cette connaissance de la dangerosité de ce matériau, " les mesures prises n’ont pas été à la hauteur des risques encourus par les salariés exposés à l’amiante " comme l’écrivent les magistrats de la rue Cambon.
" Mesures tardives ", " Mesures non proportionnées à l’importance du risque ", " Une action moins déterminée que celle conduite dans d’autres pays européens ", de nombreux extraits de ce relevé de conclusions provisoires démontrent que la catastrophe sanitaire de l’amiante n’aurait pas connu cette ampleur si les dispositions de prévention avaient été prises.
Le document pointe également la pression exercée par les industriels, leur maîtrise de l’information à travers l’action du Comité permanent amiante, l’absence de signal fort émanant des autorités scientifiques et de celles chargées de la prévention. Le réquisitoire est sévère mais sans surprise à l’égard de la Cnam-TS (Commission ATMP, Direction des risques professionnels) et de l’INRS. Malgré leur mission de prévention et les moyens scientifiques et techniques dont ils disposaient, ni l’une ni l’autre ne se sont démarqués de la ligne imposée par les industriels qui visait à promouvoir l’utilisation contrôlée de ce matériau.
Pour l’Andeva, il est clair que ce rapport confirme une fois encore que les intérêts des industriels ont prévalu sur les impératifs de santé publique. Il est tout aussi clair que tant que les institutions chargées de la recherche sur les risques au travail, de la diffusion des connaissances et de la prévention ne seront pas cloisonnées de façon étanche avec les intérêts économiques de ceux qui créent le risque, l’organisation de la lutte contre les risques professionnels sera défaillante.
Force est de constater que de ce point de vue, les enseignements de la catastrophe de l’amiante n’ont pas été tirés. Les choses sont toujours en l’état.
Sur la question de la réparation, les conclusions du rapport viennent appuyer les critiques et confirme la légitimité des revendications de l’Andeva : des difficultés de reconnaissance des maladies professionnelles par les Cpam, un système d’indemnisation contesté, un suivi médical post professionnel en panne, un accès à la cessation anticipée d’activité complexe et incomplet.
L’Andeva demande une fois encore au gouvernement de tirer tous les enseignements de ce rapport et de mettre en œuvre les réformes nécessaires.
Les victimes de l’amiante veulent aussi que justice leur soit rendue. Le rapport de la Cour des Comptes démontre que, comme dans l’affaire du sang contaminé, ceux dont la mission était de prévenir des risques qu’ils connaissaient n’ont pas agi en temps et en heure.
Des négligences, des fautes graves ont été commises, comme des centaines de jugements devant les juridictions civiles l’ont déjà montré. A l’évidence, les industriels de l’amiante ont organisé la dissimulation des informations relatives aux dangers de ce matériau qu’ils voulaient continuer d’exploiter, quel qu’en soit le prix à payer pour des dizaines de milliers de victimes.
Et pourtant, à ce jour, aucun procès pénal n’a eu lieu, aucun responsable de cette catastrophe n’a eu à répondre de ses actes. Aucun Procureur de la République n’a spontanément ouvert d’information judiciaire… Saisie par l’Andeva de cette situation intolérable, la Garde des Sceaux n’a même pas daigné répondre !
C’est pour cet ensemble de raisons, dont le rapport de la Cour des Compte confirme aujourd’hui l’acuité, que l’Andeva manifestera aux côtés de la Fédération Nationale des Accidentés du Travail et des Handicapés (FNATH) et avec le soutien de la Fédération des Mutuelles de France (FMF), à Paris, le 29 septembre prochain, pour demander justice pour les victimes de l’amiante et la réparation intégrale des préjudices pour toutes les victimes du travail.
(1) le rapport de la Cour des Comptes sera disponible très prochainement sur le site de l’Andeva.