Caper Auvergne




Le patron d’Amisol mis en examen pour empoisonnement

A Clermont-Ferrand, le juge Royet a mis en examen le PDG de la société Amisol.

Cette mise en examen est la première en France dans le dossier de l’amiante ; elle intervient près de trois ans après que la plainte ait été déposée par 8 anciens salariés de cette usine, fermée depuis 1974. Cela laisse espérer aux victimes que justice leur soit enfin rendue et que les responsabilités multiples de ce scandale sanitaire soient clairement établies.

Logiquement, il faut s’attendre à ce que d’autres secteurs soient prochainement poursuivis ; d’autres industriels de l’amiante ainsi que les organisations qui défendaient leurs intérêts économiques au mépris de la santé de leurs salariés ; des responsables des pouvoirs publics, voire des politiques qui n’ont pas pris toutes les dispositions pour empêcher cette catastrophe ; des membres du corps médical et des scientifiques qui ne sont pas intervenus malgré les connaissances qu’ils avaient ou qu’ils auraient dû avoir sur la dangerosité du matériau.

D’autres plaintes pénales ont été déposées sur d’autres sites par l’ANDEVA et plusieurs victimes, comme à Paris, Dunkerque, Saint-Nazaire, Valenciennes, Riom et Caen il y a maintenant trois ans.

Nous espérons que cette décision du juge Royet à Clermont Ferrand relancera ces affaires dont les différentes instructions n’ont toujours pas abouti.

Article paru dans le bulletin de l'Andeva N°5 (juin 1999)



Un témoignage de Josette Roudaire

" L’amiante était travaillée à la fourche "

Tous ceux qui ont découvert Amisol au moment de sa fermeture en 1974 ont été affolés. Ils ont parlé de " l’usine de la honte " et " d’enfer blanc ". Cela donne une idée des conditions de travail effroyables qui régnaient quand elle était en activité.

Aujourd’hui la loi considère qu’au-dessus de 5 fibres d’amiante par litre, un bâtiment présente des risques. Mais à l’époque dans nos locaux de travail il y avait plusieurs centaines de milliers voire plusieurs millions de fibres.

Si Henri Pézerat et des gens de Jussieu n’étaient pas venus en 1977 pour nous faire découvrir ce scandale, il serait sans doute passé inaperçu à ce moment-là.

L’amiante arrivait dans des sacs de Rhodésie et d’URSS. Il était travaillé à la fourche. On prenait les sacs à la main. On balançait l’amiante dans une cardeuse et toute la chaîne continuait jusqu’au produit fini : cardage, filage, tissage, tressage.

On travaillait " le nez au vent " sans aspiration, dans une atmosphère blanche d’amiante. Il neigeait tous les jours, mais ce n’était pas Noël !

Il aurait été impensable que le PDG d’Amisol n’ait pas de comptes à rendre à la justice. C’était bien le minimum.

La décision a été bien accueillie. Une copine a dit : " avant on avait l’impression de se battre contre un fantôme. Maintenant il a un nom et un visage, et il est mis en examen ".

En fait il y a plus de soulagement que de joie.

Dans cette entreprise où travaillaient 271 personnes au moment de la fermeture, il y a eu plusieurs dizaines de malades et beaucoup de décès.

Article paru dans le bulletin de l'Andeva N°5 (juin 1999)